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A Bure, la lutte monte contre les déchets nucléaires
Article mis en ligne le 16 juin 2016
dernière modification le 13 juin 2016

Depuis le 9 juin, les opposants à la poubelle nucléaire multiplient les actions de blocage et de parasitage des travaux préparatoires à Cigeo. L’Andra veut démarrer un chantier dans une forêt stratégique. La réactivité des opposants témoigne de la montée en puissance de la lutte lors des dernières années.

« Sauvons la forêt de Mandres, bloquons CIGEO ! » Jeudi 9 juin, 5h30 du matin, à Bure. Soixante silhouettes se découpent sur l’horizon brumeux où le soleil de l’aube se lève. Vêtus de combinaisons blanches, munis de masques, pelles, pioches, ils avancent de front derrière une banderole proclamant « Pas de foreuses dans nos forêts ». Leur objectif ? « Bloquer les travaux que l’ANDRA a démarré dans le bois communal de Mandres-en-Barrois » explique, dans le cortège, Michel Labat, un des habitants de ce village situé à 2 km à peine du laboratoire de recherche de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA). (...)

Cette forêt de feuillus d’environ 300 ha serait rasée pour permettre la construction, sur une surface équivalente, d’une des deux grandes installations de surface du projet CIGEO, « la zone des puits, qui ventileraient les rejets des 300 km de galeries stockant les déchets, creusées 500 m en-dessous ».

Depuis mai, plateforme grillagée, camions de forage, abatteuses et vigiles ont élu domicile dans ce massif que l’agence a échangé contre un bois mitoyen en juillet 2015. « Une entourloupe scandaleuse ! », s’exclamait Anthony Foissy, jeune habitant de Mandres, acclamé lors de sa première prise de parole publique pendant les 200 000 pas le 5 juin. (...)

Pour s’opposer à ce rouleau compresseur, les militants ont empêché, de 6 h à 10 h, le démarrage des travaux ,en s’installant à proximité de la plateforme protégée par des dizaines de vigiles et gendarmes mobiles. Barricades, tranchée, sabotage de la remorque d’un grumier, conférences gesticulées sur le nucléaire devant les forces de l’ordre se sont déroulés dans une ambiance joyeuse. (...)

De nombreux militants sont venus en renfort, de Nancy et d’ailleurs, suite à l’envoi d’un texto de mobilisation la veille au soir. « On n’avait plus vu une telle réactivité à Bure depuis le blocage du débat public en 2013 » se réjouit Yohann (prénom changé), habitué de la Maison de résistance à la poubelle nucléaire. Vendredi 10, 30 personnes sont reparties jouer au chat et à la souris avec les machines et les vigiles. Samedi 11, une nouvelle ballade a carrément mis à terre des grilles de la plateforme de chantier LIEN. La vigueur des opposants confirme que, depuis quelques années, la lutte se renforce sur de multiples fronts

La lutte s’enracine et les rencontres se multiplient (...)

A 8 km de Bure, un nouvel espace d’organisation, la « gare de Luméville », s’est consolidé après avoir accueilli le campement antiautoritaire et anticapitaliste d’août 2015. Sur cette ancienne gare de marchandises en friche rachetée par un groupe d’opposants il y a 10 ans, plusieurs chantiers collectifs ont eu lieu tout au long de l’année. En mars, un grand préau en bois en charpente ancienne a été construit par des occupants de la ZAD de Roybon, tandis que l’intérieur d’un des bâtiments est progressivement réhabilité. Située à côté du tracé de la voie ferrée qui acheminerait les trains de déchets, « c’est une nouvelle base stratégique qui montre que la lutte anti-nucléaire grandit en France » commentait avec enthousiasme Fabrizio, militant allemand du réseau Anti-atomnet de Trêves, venu lors des 200 000 pas.

Le front paysan : « Des semis radieux, pas des champs irradiés ! » (...)

Lutter contre la poubelle nucléaire et son monde

Occupation agricoles et front paysan, constructions collectives, sabotages, attaque de grilles, blocage de chantiers : en plus de l’important travail juridique et de sensibilisation, les multiples actions directes attestent d’une certaine « radicalisation » de la contestation. (...)

Ce rapport de force à construire semble être pris aux sérieux par les opposants qui appellent, dans l’urgence, à un grand rassemblement le 19 juin à Mandres-en-Barrois pour converger vers la forêt menacée. Pique-nique, ballade et autres initiatives pour « empêcher l’ANDRA de creuser son trou » sont prévus par les opposants qui veulent bloquer les travaux comme ils ont bloqué le débat public en 2013. Après avoir repris son essor pendant les dernières années, la lutte contre la poubelle nucléaire n’a jamais été aussi loin d’être enterrée.