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Agression raciste à Beaune : quand l’Etat transforme les victimes en voyous
Article mis en ligne le 8 août 2018

La semaine dernière, à Beaune, un groupe de jeunes de quartier s’est fait tiré dessus. Des coups de feu accompagnés d’insultes racistes « sales bougnoules, rentrez chez vous ! ». Dix jours après cette agression d’une extrême violence, le silence et l’indifférence générale sont toujours de mise et le traitement judiciaire et médiatique est marqué par l’invisibilisation du caractère raciste de l’agression et la stigmatisation des victimes, qui tendent à en être tenues pour responsables.

Dans la nuit du dimanche 29 juillet au lundi 30, une voiture a foncé sur une quinzaine de jeunes qui discutaient sur une aire de jeux dans le quartier de Saint-Jacques, à Beaune. Les jeunes ont réussi à éviter, in extremis, le véhicule. Mais, dans les coups de 4h du matin, une autre voiture revient sur les lieux, et les deux passagers, armés d’un fusil de chasse de petit calibre tirent sur eux. Les coups de feu ont blessé sept d’entre eux, âgées de 16 à 20 ans. Six d’entre eux ont été admis à l’hôpital de Beaune et une victime grièvement blessée - le corps criblée de balles de plomb, dans les reins, les poumons, les jambes.. - a été transférée au CHU de Dijon.

Une agression d’une extrême violence. Les victimes, qui affirment ne pas connaître leurs agresseurs, sont aujourd’hui toutes, psychologiquement, en état de choc. Alors que les autorités, les enquêteurs et les médias mettent l’accent sur un possible « règlement de comptes », entre différentes « bandes », les victimes de l’agression dénoncent quant à elles une agression raciste, « perpétrée au hasard ».(...)

Les médias – lorsque ces derniers daignent visibiliser et porter de l’intérêt à cette affaire et à ses victimes - mettent en avant la piste du règlement de comptes, qui serait « privilégiée ».. Cette piste du règlement de comptes, tant mise en avant par la justice et les médias, tend à faire deux choses : étouffer la nature raciste de cette agression et tenir les victimes, renvoyées au statut de prétendus « voyous », « délinquants », pour responsables et coupables de l’agression qu’ils viennent de subir. Alain Sugneau, maire de Beaune, a même envisagé la mise en place d’un couvre feu pour les mineurs !

Le traitement politique et médiatique est ici symptomatique des clichés que l’on assigne aux jeunes issus de quartiers, et de la manière dont l’Etat français et ses relais traitent ces derniers. (...)

Le traitement politique de cette agression a par ailleurs été dénoncé par des associations antiracistes qui ont dénoncé les commentaires haineux sur les réseaux sociaux, ainsi que l’attitude des médias, politiques et de la justice. Ce traitement a, légitimement, également procuré la colère des jeunes qui ont subit l’agression.

Ces derniers déplorent en effet le « manque de soutien des autorités locales, voire nationales, face à une agression d’une exceptionnelle gravité qui s’est finalement conclue par une fusillade qui aurait pu leur enlever la vie ». Du côté de la classe politique, c’est en effet le silence radio depuis 10 jours.(...)

Ainsi, l’une des victimes a déclaré dans une vidéo : « Nous on est là à courir à gauche à droite, à prouver que c’est pas un règlement de comptes, qu’il s’agit vraiment d’un acte raciste ». Encore une fois, il semblerait que pour ces victimes de violences racistes, l’obtention de la justice et la reconnaissance du statut de victime d’agression raciste risquent d’être un combat. Un combat pour imposer un autre récit que celui des médias et des politiques et pour que ces jeunes soient reconnus par la justice, celle là même qui a rapidement écarté la piste raciste de l’agression, comme victimes d’une agression à caractère raciste.