
Dans la Meuse, le projet d’enfouissement des déchets nucléaires avance ses pions face aux opposants qui résistent à l’expropriation de l’ancienne gare de Luméville-en-Ornois, et préparent une grande manifestation le 20 septembre.
L’ancienne gare de Luméville-en-Ornois sait que ses jours sont comptés. Derrière la porte métallique fermée et les pneus en guise de barricade, ce lieu emblématique de la lutte meusienne contre le nucléaire acheté en 2007 par un groupe de militants se prépare à la tentative d’expulsion à venir. La raison ? Elle est située sur le futur trajet des déchets radioactifs vers le site d’enfouissement de Bure. Et à ce titre, concernée par la déclaration d’utilité publique de juillet 2022, qui a rendu possible l’expropriation de ces terres.
Lieu de vie et de résistance qui a accueilli depuis bientôt vingt ans festivals, spectacles, rencontres et formations, l’ancienne gare voit désormais des vigies s’ériger en prévision de sa défense. Le calendrier précis de cette épée de Damoclès n’est pas encore connu, car les opposants ne disposent que d’un seul repère temporel pour dater la menace : le versement par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) du montant des indemnités pour compenser le rachat forcé de la gare. Une fois que ce sera fait, la gare sera expulsable sous un mois.
« Occuper notre propre lieu »
« Plutôt que d’attendre de ne plus être propriétaires, on s’est dit qu’on allait proposer d’occuper notre propre lieu. C’est l’objectif de Septembre Infini, pour que ça ne s’arrête pas… » dit Bruno [*] qui a l’habitude de venir régulièrement participer à des chantiers à Bure et est venu, cette fois, pour ce Septembre Infini.
Septembre Infini, une occupation qui se revendique anti-autoritaire, antinucléaire, décoloniale, féministe, queer et autonome, a démarré le 25 août. (...)
Cette pression des autorités sur la lutte est palpable dans tous les environs. Des gendarmes patrouillent dans des voitures banalisées. Les militants disent tous leur habitude et leur lassitude d’être contrôlés. (...)
Manifestation le 20 septembre
Une manifestation prévue le 20 septembre s’inscrit dans ce contexte répressif et entend dénoncer le passage en force du projet Cigéo. « Par exemple, ils veulent réduire l’instruction de la Demande d’autorisation de création (DAC) à trois ans alors que ça pourrait prendre cinq ans » souligne Angélique.
« Et on balaie sans cesse nos demandes alors que nous posons des questions cruciales sur la géologie, la géothermie, la transmission de la mémoire, les risques d’inondations et d’explosions… poursuit-elle. L’idée d’enfouissement d’il y a 20 ans n’est plus la même dans le contexte géopolitique et le dérèglement climatique actuel. » (...)
Cette manifestation veut marquer un tournant vers un avenir désirable, sans nucléaire, sans Cigéo. Elle arrive au cours d’un mois de septembre marqué par une rentrée politique trouble et des mouvements sociaux : « Comme le mouvement Bloquons Tout du 10 septembre, nous souhaitons un autre futur, nous refusons d’aller droit dans le mur. L’énergie nucléaire est un gouffre financier, elle a un impact sur les factures énergétiques. On refuse aussi un monde où le pouvoir est hyper centralisé. Ce n’est pas sans lien », analyse Angélique. On veut faire bifurquer le futur, pour que ce monde qu’on léguera ne soit pas un monde de chaos ! » (...)
Ces futurs travaux remobilisent la résistance antinucléaire : de nombreuses composantes de la lutte seront présentes pour la 20 septembre. Entre autres signataires, Greenpeace, Les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne, l’Union syndicale Solidaires, des partis politiques jusqu’au collectif chrétien-révolutionnaire Anastasis.
Les organisateurs invitent à écrire des messages aux générations futures, qui seront laissés dans des capsules au cours de la manifestation. (...)