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Sciences, Eaux et Territoires
Focus sur le projet « Z », un espace de production de fruits renforçant les régulations biologiques dans un objectif zéro phyto
#agriculture #projetZ #agroecologie #vergers
Article mis en ligne le 28 juillet 2025

Comment produire des fruits en renforçant les services écosystémiques pour limiter, voire supprimer, l’utilisation des pesticides ? Avec le projet Z – pour zéro pesticide – l’unité expérimentale INRAE de Gotheron (Drôme) et ses partenaires explorent une approche agroécologique pour relever ce défi. En expérimentant un nouveau type de parcelle, un verger circulaire où tout repose sur la biodiversité et son agencement spatial, l’enjeu pour les chercheurs est de comprendre les processus qui se mettent en place et d’évaluer les performances environnementales, sociales et économiques de ce type d’organisation spatiale.

Introduction

L’arboriculture, culture pérenne, est fortement consommatrice de pesticides pour contrôler un ensemble de ravageurs et maladies. Divers travaux, en particulier dans le cadre du programme national Dephy Ecophyto (https://ecophytopic.fr/), ont identifié des combinaisons de méthodes alternatives pour réduire l’utilisation des pesticides (par ex. – 25 % en moyenne en arboriculture dans le réseau FERME entre pratiques initiales et pratiques moyennes 2015-10171). Certains travaux pointent également la difficulté de poursuivre cette diminution une fois que les principaux leviers mobilisables (ex. : variété peu sensible, confusion sexuelle, désherbage mécanique, prophylaxie 2) ont été mis en œuvre dans le verger (Simon et al., 2018). Au-delà de spécificités de l’arboriculture (ex. : pérennité qui favorise le maintien de certains bio-agresseurs, mise en marché de fruits frais rémunérés sur l’aspect visuel), l’intensification et la spécialisation des vergers, qui ont permis des gains de productivité, ont également induit une standardisation et une très faible diversité génétique de l’agrosystème verger, le rendant très vulnérable à des attaques de bio-agresseurs.

Nous avons fait l’hypothèse qu’il est nécessaire de repenser l’espace de production de fruits, sa composition, sa diversité et son agencement, ainsi que les pratiques et les zones associées à cet espace, afin de le rendre très défavorable pour les bio-agresseurs et a contrario très accueillant pour les auxiliaires, en vue de produire des fruits en mobilisant en priorité les régulations biologiques. Cette approche agroécologique est complexe et peu explorée ; elle s’appuie sur des connaissances et démarches précédentes (ex. : production fruitière intégrée, agriculture biologique, agroforesterie), et des approches inspirées des agroécosystèmes tropicaux et naturels (e.g. Malézieux, 2012) qui diversifient fortement l’espace de production. Reconcevoir de novo le verger est une approche complexe car elle suppose de piloter des processus biotiques et un ensemble d’interactions au sein de l’agroécosystème, à des échelles spatiales supra-parcellaires et temporelles longues. Elle demande également de repenser l’organisation du travail dans de tels espaces et le ou les modes de commercialisation des productions. L’objectif de ce focus est d’illustrer la démarche et de présenter le premier dispositif agroécologique planté dans le cadre du projet « Z » en cours de développement, en pointant les principes de conception identifiés, qui peuvent être déclinés dans d’autres contextes. (...)

Lire aussi :

 (INRAE)
Le verger de Gotheron : quand la biodiversité tourne rond

Produire des fruits avec zéro pesticide, voilà l’ambitieux défi que se sont fixé les chercheurs d’INRAE de l’UERI de Gotheron (Drôme) impliqués dans le Projet Z. Ce projet de plus de 10 ans vise à concevoir un système sans pesticides et très bas intrants. Deux ans ont été nécessaires pour coconcevoir* un premier module (1,5 ha), qui a été mis en place début 2018 et sera suivi sur plus de 10 ans. (...)

Première surprise, le verger de 1,5 hectare est rond, une forme choisie pour limiter la surface d’échange avec l’extérieur. Il est cerné par une double haie de 500 mètres de long, incluant quelques amandiers et châtaigniers qui, en plus de son effet brise-vent, constitue une barrière pour limiter la progression des ravageurs. (...)

Une première barrière pour fixer les bioagresseurs

Le long de cette première barrière sont installés des nichoirs, des perchoirs, des tas de branchages et des pierriers qui favorisent l’installation d’auxiliaires prédateurs tels que les mésanges insectivores, les rapaces, les reptiles et les belettes (prédateurs de campagnols). Cette première barrière représente également une zone de biodiversité qui fournit ressources alimentaires et habitats pour la faune auxiliaire. Ces auxiliaires sont des prédateurs ou parasitoïdes, vertébrés et invertébrés, qui contribuent à la régulation des populations de ravageurs des arbres fruitiers (pucerons, campagnols...). Les bioagresseurs qui franchissent cette première barrière parviennent à un rang circulaire de pommiers peu sensibles qui jouent le rôle de piège en fixant les pucerons attirés par cette espèce fruitière.
Attirer les auxiliaires, éloigner les ravageurs

Le cercle suivant est constitué d’arbres et arbustes fruitiers variés. Notamment des espèces prospectives telles que la grenade et la figue, implantées dans un contexte du changement climatique. Ce cercle vise à protéger les nombreux pommiers, pêchers, pruniers et abricotiers situés sur les cercles intérieurs où se concentre l’essentiel de l’espace de production. Toutes les variétés ont été choisies pour leur résistance naturelle aux maladies. (...)

L’unité a par ailleurs coordonné le développement de DEXiFRuits, un outil informatique pour l’évaluation de la durabilité des vergers (principalement pommiers et pêchers). Cet outil permet aux producteurs, conseillers et techniciens de comparer facilement des performances environnementales, économiques et sociales, dans une démarche de réduction des intrants et sans mettre en péril l’exploitation.