
Les dirigeants des pays de l’UE, le Premier ministre britannique et le secrétaire général de l’Otan se retrouvent lundi à Bruxelles pour tenter de doper les dépenses de défense face à l’agressivité de la Russie. Dans le même temps, Donald Trump exige des alliés qu’ils passent à la vitesse supérieure en consacrant au moins 5 % de leur produit intérieur brut aux dépenses militaires.
Ce sommet dans la capitale belge est une "triple première" : première fois que les pays de l’Union européenne se retrouvent depuis la prestation de serment de Donald Trump, première fois que leur rencontre est consacrée exclusivement à la défense, et première fois qu’un dirigeant britannique se joint à eux depuis le Brexit.
Depuis le lancement de l’invasion russe de l’Ukraine, il y a près de trois ans, les pays européens ont sensiblement augmenté leurs budgets militaires. Mais ils reconnaissent aussi presque à l’unisson qu’ils ne s’arment pas encore assez vite sur fond d’inquiétudes croissantes face à la possibilité que Vladimir Poutine s’en prenne à l’un d’entre eux dans les années à venir.
La retour de Donald Trump à la Maison Blanche a donné une nouvelle dimension au débat, le tonitruant président répétant sur tous les tons que l’Europe ne doit plus tenir la protection américaine pour acquise. (...)
Le Groenland et le spectre d’une guerre commerciale
Le magnat de l’immobilier a aussi promis sur les estrades de campagne de mettre rapidement fin à la guerre en Ukraine, suscitant l’inquiétude des Européens qui redoutent qu’il contraigne Kiev à accepter un mauvais accord.
Au-delà de la question de défense, Trump a multiplié les menaces, tous azimuts, envers ses alliés européens. (...)
La Première ministre danoise Mette Frederiksen – qui vient d’effectuer une tournée de plusieurs capitales européennes – espère un message commun face aux visées du milliardaire républicain sur le Groenland, un territoire dépendant de son pays.
Le spectre d’une guerre commerciale planera aussi sur la rencontre de Bruxelles. (...)
Si le consensus sur la nécessité d’augmenter les dépenses de défense est là, la façon d’y parvenir reste l’objet d’âpres débats. (...)
Sur les achats d’armes, la France – accusée par certains de ses partenaires de se préoccuper d’abord de son industrie nationale – insiste sur l’origine européenne de la production.
D’autres pays jugent qu’au moment où l’industrie européenne peine à soutenir la cadence, les critères ne devraient pas être trop stricts. Et acheter des armes aux États-Unis pourrait être un moyen de garder des relations aux moins correctes avec Trump, arguent-ils. (...)
Depuis son arrivée au pouvoir en juillet, le travailliste Keir Starmer affiche sa volonté de relancer les relations avec Bruxelles et l’hypothèse d’un accord de sécurité est évoquée.
"L’Europe doit redoubler d’efforts pour écraser la machine de guerre de Poutine, alors que l’économie russe montre des signes d’affaiblissement", déclarera Keir Starmer devant le Conseil européen, selon un communiqué de Downing Street.
Les tensions héritées du Brexit subsistent toutefois, et les points de friction n’ont pas complètement disparu. Au-delà des appels au "reset" ("nouveau départ"), nombre de diplomates européens jugent qu’il ne pourra y avoir de progrès tangibles avec Londres en l’absence d’accord en particulier sur l’épineux dossier des droits de pêche.
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À l’issue de cette "retraite" informelle des Vingt-Sept, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a évoqué devant la presse quelques pistes de financement pour accroître les capacités de défense européenne. Elle a ainsi suggéré plus de flexibilité dans les règles budgétaires, qui limitent les déficits publics des États membres à 3 % de leur produit intérieur brut (PIB) et leur niveau d’endettement.
"Nous sommes tous d’accord pour dépenser plus et pour dépenser mieux", a assuré de son côté Antonio Costa, le président du Conseil européen, instance qui réunit les chefs d’État et de gouvernement de l’UE.
Mais face aux propos menaçants du 47e président américain, qui imposé puis suspendu des droits de douane au Canada et au Mexique, les Européens ont tenté de trouver le bon ton pour préparer une éventuelle riposte. (...)
"Je peux seulement dire que nous sommes prêts", a répondu lundi soir Ursula von der Leyen, mais l’Europe doit aussi "être très pragmatique (...), discuter et négocier si nécessaire", a-t-elle insisté. (...)
La présidente de la Commission européenne n’a toutefois pas totalement écarté l’idée d’un financement commun de projets européens spécifiques, dans le domaine par exemple des capacités de défense anti-aérienne, dont la guerre en Ukraine a révélé les capacités insuffisantes en Europe. Elle présentera les propositions de la Commission dans un "Livre blanc" sur la défense, attendu à la mi-mars, pour préparer les décisions des Vingt-Sept en juin lors d’un sommet européen.