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Mediapart
Le gouvernement achève bien les chômeurs
#Bayrou #Macron #budget #inegalites #chomeurs
Article mis en ligne le 12 août 2025
dernière modification le 10 août 2025

Lancer les attaques sur les chômeuses et chômeurs en plein cœur de l’été, ou pendant les fêtes de fin d’année, est devenu une grande spécialité de l’exécutif. Dans la nuit du 8 au 9 août 2025, le premier ministre a adressé aux partenaires sociaux (représentant les salarié·es et le patronat) la tant attendue « lettre de cadrage » sur l’assurance-chômage.

Il s’agit de la feuille de route pour une énième réforme que le gouvernement souhaite engager, alors même que le dernier accord conclu en la matière date de novembre 2024, avec de nouvelles règles, pour quatre ans, entrées en vigueur au 1er avril de cette année. Il s’agira donc de la cinquième réforme de l’assurance-chômage depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir.

Le gouvernement souhaite taper très fort pour atteindre « 2 à 2,5 milliards d’euros » d’économies par an, de 2026 à 2029, selon le document que Mediapart a pu consulter. La lettre de cadrage prévoit surtout une « une montée en charge progressive », pour atteindre « a minima 4 milliards d’euros d’économies en régime de croisière à partir de 2030 ». L’objectif ? Réduire toujours plus les indemnités chômage afin d’« inciter au retour vers l’emploi ».

Les partenaires sociaux sont désormais invités à s’accorder d’ici au 15 novembre sur les pistes du gouvernement. Si aucun accord n’est trouvé entre les organisations syndicales et le patronat, ce qui risque grandement d’arriver, le gouvernement aura les mains libres pour appliquer, seul, de nouvelles coupes drastiques d’ici à la fin de l’année.

Si la lettre est bien arrivée à destination, elle a été très mal reçue par les organisations syndicales, qui ont immédiatement répliqué. « En plein milieu de l’été, au moment où les Françaises et les Français tentent, pour ceux qui en ont encore les moyens, d’oublier un quotidien qui se dégrade, le gouvernement décide une nouvelle attaque en règle des droits des travailleurs et travailleuses », s’indigent ainsi la CFDT, la CGT, la CFTC, la CFE-CGC et FO dans une réponse commune.

Dans le détail, la lettre de cadrage reprend une grande partie des axes budgétaires présentés par le premier ministre à la mi-juillet. « Un musée des horreurs », résumaient déjà, à l’époque, les syndicats.

Attaque contre la rupture conventionnelle (...)

durcir les règles entourant ce mode de départ d’une entreprise. L’une des options sur la table est l’allongement du délai avant de toucher le chômage après le départ de l’entreprise. (...)

« Il est question d’abus des recours à la rupture conventionnelle alors que les salariés et les employeurs ne font que rompre légalement le contrat de travail par un mode de rupture prévu par la loi, abonde Michèle Bauer, avocate en droit du travail à Bordeaux. Si les ruptures conventionnelles sont importantes et augmentent chaque année, les démissions et les licenciements sont toujours plus nombreux que la rupture conventionnelle. » (...)

Deuxième charge sur les ouvertures de droits

Le gouvernement souhaite une révision, à la hausse, de « la durée minimale d’emploi » avant qu’il soit possible d’ouvrir ses droits au chômage. (...)

En 2021, la première réforme avait déjà allongé la durée nécessaire de travail pour bénéficier d’une indemnisation, la faisant passer de quatre à six mois. La mesure avait fait très mal aux jeunes et aux travailleuses et travailleurs précaires. (...)

Les hauts salaires et les séniors à nouveau visés

Si la feuille de route promet également de ne pas toucher aux « bornes d’âge » mises en place pour les séniors, et permettant aux personnes âgées de 55 ans et plus de bénéficier d’une durée d’indemnisation plus longue, elle demande toutefois aux partenaires sociaux de travailler à « une adaptation des règles spécifiques applicables aux salariés seniors et sur les moyens de les inciter à reprendre un emploi ». (...)

Le document de cadrage invite par ailleurs syndicats et patronat à se pencher sur les allocations chômage des personnes qui avaient un solide revenu avant d’être sans emploi, précisant que le montant et la durée des droits « pourraient être mieux adaptés au niveau de revenu préalable à la perte d’emploi ». (...)

Ne pas revaloriser l’indemnité chômage

« Au regard de l’effort général demandé aux Français en ne revalorisant pas l’ensemble des prestations en 2026, envisager, par parallélisme et dans un souci de justice, une mesure similaire pour les prestations d’assurance-chômage », précise la lettre de cadrage. Et ce, alors que la revalorisation pour l’année 2024 était déjà bien faible, de 0,5 % alors que l’inflation était de 2 %. De quoi, là encore, provoquer l’ire des syndicats, dont la CGT. (...)

À Mayotte, où les prestations sociales sont nettement inférieures à celles en Hexagone, l’annonce sera d’autant plus difficile à supporter. Si une loi a été votée à l’été pour un alignement des prestations, l’égalité n’est prévue que d’ici à 2031. (...)

Les syndicats se donnent rendez-vous le 1er septembre pour se concerter sur la réponse à apporter au gouvernement. Force ouvrière a d’ores et déjà appelé à la « mobilisation et à la grève », et a déposé un préavis du 1er septembre au 30 novembre.

Déni de démocratie sociale

« Les objectifs annoncés représentent 10 % d’économies alors qu’on a déjà fait d’énormes économies depuis des années, qui ont créé de la pauvreté, souffle pour sa part Denis Gravouil (CGT). Le dernier rapport de l’Insee a démontré que les inégalités sociales ont explosé, en citant clairement les réformes de l’assurance-chômage, qui ont poussé de nombreuses personnes au RSA. »

Même réaction indignée côté CFDT, qui se dit « très déçue et très énervée ». (...)

L’exécutif feint toujours de croire que les réformes de l’assurance-chômage permettent de « remettre » durablement les chômeuses et chômeurs au travail, alors que ses propres services ont récemment démontré le contraire. (...)