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Le 10 septembre, une journée de violences policières passée au crible
#resistances #10septembre #10septembre2025 #bloquonstout #10s25 #indignonsnous #violencespolicieres
Article mis en ligne le 19 septembre 2025
dernière modification le 18 septembre 2025

La journée de blocage du 10 septembre a été émaillée par de nombreuses violences policières graves. StreetPress en a relevé plus d’une cinquantaine dans différentes villes : fractures de la main, du coude ou de l’avant-bras, traumatisme crânien…

Il ne fait pas encore jour, le mercredi 10 septembre, que les forces de l’ordre interviennent déjà sur les premiers blocages de lycées ou de ronds-points dans le cadre du mouvement « Bloquons tout », et que les premières vidéos apparaissent sur les réseaux. Ici, une charge policière contre des manifestants. Là, des lycéens aspergés de gaz lacrymogènes. Et rapidement, les images de violences policières inondent les réseaux sociaux. « On ne tolérera aucun blocage, aucune violence », déclarait le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, sur France 2. En cette journée de mobilisation, les forces de l’ordre semblent avoir bien reçu le message. StreetPress, en partenariat avec le site violencespolicieres.fr, a analysé 59 situations de violences policières illégitimes.

Après l’évacuation d’un blocage du lycée Hélène Boucher à Paris (20e), StreetPress capture l’interpellation brutale d’un lycéen, la tête violemment projetée contre le mur par un policier. La vitrine du magasin adjacent est maculée de sang. Sur une autre vidéo prise non loin de là, des parents fuient avec leurs enfants, en pleurs, les gaz lacrymogène ont empli la rue de l’école maternelle Maryse Hilsz. Du côté de Clermont-Ferrand (63), le journal de « La Montagne » diffuse l’image d’un policier actionnant à bout portant sa gazeuse lacrymogène sur le visage d’une personne, assise sur le trottoir, près d’un point de blocage. Une heure plus tard, la même unité est filmée en train d’asperger « sans raison » une dizaine de cyclistes qui rentrent de l’opération en direction du centre-ville, rapporte un témoin. (2)

À Montpellier (34), en début d’après-midi aux alentours de 14 heures, un manifestant est violemment renversé par le jet d’un canon à eau sur la place de la Comédie, qui le frappe à la tête (3). Ses pieds décollent du sol. Hospitalisé dans un état grave pour un traumatisme crânien, il souffrirait de troubles neurologiques, selon un message de ses proches. À Cherbourg-en-Cotentin (50), un manifestant est frappé puis étranglé par un policier en civil, alors que ce dernier tente de rester accroché à une barrière (4). (...)

Charges, coups de matraque et gaz lacrymogènes

Rassemblés en fin de matinée à la gare du Nord sur l’appel des cheminots, les manifestants ont voulu rejoindre la place du Châtelet, où les syndicats se donnaient rendez-vous en début d’après-midi. Dès l’apparition des premiers manifestants habillés en noir, puis tout l’après-midi, les forces de l’ordre ont multiplié les charges le long du boulevard de Strasbourg puis du boulevard de Sébastopol. (...)

Sur les nombreuses vidéos réunies par StreetPress, trois charges, sous plusieurs angles, sont capturées. Les policiers foncent en poussant les personnes se trouvant sur leur passage, jusqu’à arriver au contact du cortège, dense, sur lequel s’abat une pluie de coups de matraque, parfois à hauteur de tête. Une stratégie pour « casser le black bloc », assumait le préfet de police, Laurent Nunez, dans « Libération » en 2023. Casser les corps, aussi.

Dans la foule remplissant le boulevard de Strasbourg, Emma (1), 18 ans, n’a pas le temps de fuir. Un coup de matraque lui fracture la main droite, avec laquelle elle écrit. L’étudiante en école d’art doit porter une attelle pendant plusieurs semaines. Elle compte porter plainte. Son ami, tombé par terre lors de la charge, est écrasé par des manifestants avant de recevoir plusieurs coups de matraque au visage. (...)

Plusieurs journalistes présents dans la foule sont également poussés ou matraqués lors des charges, malgré leur caméra ou brassard « presse » apparent. Plus tard à Châtelet, c’est entouré d’une douzaine de caméras qu’un policier — sans matricule et le visage partiellement dissimulé par un cache-cou — inflige un coup de poing au visage d’un manifestant, qui lui a brisé son bâton souple. Un autre, major, frappe la caméra d’un reporter. « Sept cas de journalistes entravés physiquement par les forces de l’ordre dans l’exercice de leur fonction » ont été recensés par Reporters sans frontières. (...)

Plusieurs blessés graves

Marius, 19 ans, soupçonne les mêmes policiers de l’avoir violenté, en amont du boulevard de Belleville. Alors qu’il rentre chez lui avec un ami, un manifestant lance en direction de policiers, à côté d’eux, une bouteille en verre. « Ils étaient persuadés que c’était nous », raconte l’étudiant en journalisme sportif. Alors qu’il levait les bras, il a reçu un « déferlement de coups de matraque » avant d’être jeté et frappé au sol. « Ils ont pris mon crâne et l’ont tapé contre le béton, plusieurs fois. » D’après son témoignage, les policiers ne s’arrêtent et l’assoient qu’en apercevant son visage recouvert de sang et la « grosse flaque par terre ». Les deux jeunes hommes subissent alors une pluie d’insultes et de « ferme ta gueule ». L’un des policiers se moque :

« On vous a bien cassé la gueule. » (...)

Comme ceux d’Emma, de Camille et de Marius, les témoignages vont continuer d’affluer. Sur la base des nombreux messages et vidéos circulant sur les réseaux sociaux, comme les canaux Télégram spécialement créés pour le 10 septembre, un collectif citoyen « Observatoire de la violence policière » a recensé 129 incidents, dont « 61 blessures sérieuses », pour les régions Bretagne et Auvergne-Rhône-Alpes.