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Sauver la forêt... en puisant du pétrole : le double jeu du président Lula
#COP30 #Bresil #lula #petrole
Article mis en ligne le 21 novembre 2025
dernière modification le 20 novembre 2025

Lula, président du pays hôte de la COP30, présente un bilan flatteur sur la déforestation. Mais son soutien à de nouveaux projets pétroliers brouille le message.

Le monde entier, ou presque, est réuni à Belém pour tenter de trouver une issue à l’enfer climatique qui sévit déjà dans cette ville située aux portes de l’Amazonie. Le Brésil, lui, arrive avec un bilan convaincant : la déforestation en Amazonie a chuté à son taux le plus faible en onze ans. Une réussite qui permet, par extension, au géant sud-américain de se targuer d’une impressionnante baisse des émissions de gaz à effet de serre de 16,7 % en un an, la déforestation représentant la première cause d’émissions de CO2 du pays.

Fort de cette réussite, le Brésilien a décidé de marquer le coup en ouverture du sommet des chefs d’État préalable à la COP, le 6 novembre, en annonçant le lancement du mécanisme pour la préservation des forêts tropicales éternelles (Tropical Forest Forever Facility, dit TFFF). Un dispositif dont l’ambition est de lever 125 milliards de dollars pour la préservation des forêts tropicales. « Les forêts valent plus sur pied qu’abattues », a martelé Lula, sous les applaudissements de la quarantaine de dirigeants présents.

Passion pétrole

Une phrase bien tournée, qui ne permet pas pour autant d’effacer une autre affaire récente. Le 20 octobre, la Petrobras, compagnie pétrolière détenue par l’État, obtenait auprès de l’Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles renouvelables (Ibama) l’autorisation de rechercher des réserves d’hydrocarbures sur le site de Foz do Amazonas, pourtant situé à moins de 200 km de la plus grande forêt vierge du monde. Un projet soutenu avec enthousiasme par ce même Lula, qui critiquait en février le « baratin » de l’Ibama, trop lente à délivrer la licence à son goût.

Car l’ancien métallurgiste a beau pouvoir se targuer d’un bilan jusqu’ici inégalé en termes de déforestation, notamment en Amazonie, ses trois mandats sont marqués par un fort engagement en faveur des énergies fossiles et de l’industrie. (...)

Le président, lui, affirme vouloir utiliser la rente pétrolière de Foz do Amazonas pour financer la transition écologique du pays. Ciro Brito, membre de l’Institut socio-environnemental (ISA), ONG spécialisée dans la défense des peuples autochtones brésiliens, n’est pas convaincu. (...)

La centrale de la discorde

La controverse en rappelle une autre, datant de l’époque des premiers mandats de Lula. À l’époque, le champion de la gauche souhaitait la construction de la centrale hydroélectrique de Belo Monte, dans l’État amazonien du Pará. Colossal, le plan prévoyait de profiter de la puissance du fleuve Xingu pour alimenter quotidiennement plus de 20 millions de personnes en électricité renouvelable. Mais il nécessitait également le déplacement de milliers de personnes issues de communautés autochtones et traditionnelles (...) l’inondation de 47 800 hectares de forêt, ainsi que l’assèchement de plusieurs affluents du fleuve. (...)

Qu’importe pour Lula : lui souhaitait que le projet voie le jour. (...)

malgré la victoire de Lula, le Congrès est resté dominé par la bancada ruralista, groupe transpartisan soutien de l’agronégoce, disposant de la majorité absolue aussi bien au Sénat qu’à la Chambre des députés. C’est donc sans grande difficulté que les parlementaires ont approuvé par exemple en juillet la « loi de la dévastation », assouplissant à outrance l’obtention des autorisations environnementales pour les projets potentiellement nocifs à l’environnement.

Une situation qui, là encore, a mis l’ex-syndicaliste face à ses paradoxes. (...)

Malgré tout, dans les milieux écologistes, difficile de trouver des voix rejetant en bloc le bilan écologique de Lula. Fidèle à sa trajectoire politique, le patron historique de la gauche brésilienne a toujours fait en sorte de maintenir une ligne ouverte entre la présidence et les mouvements sociaux.

En témoigne la création du ministère des Peuples indigènes, une première mondiale, et l’homologation, le 17 novembre, de quatre nouveaux territoires indigènes, après plusieurs actions choc lors de la COP30. Ou encore, l’objectif du Brésil d’éradiquer la déforestation à l’horizon 2030. (...)