La misère est à tous les coins de toutes les rues et à tous les coins du corps et du cerveau. Mon procès de la misère, je ne veux pas que cela soit une misère de procès, je le veux flamboyant et animé, haut en verbe et en capacité de révolte, et je le fais avec la langue, puisque je suis écrivain. Ne voulant pas ajouter de la misère de langage à la misère, je veux une langue étincelante, une langue debout, une langue de combat qui montre les poings et est percutante, je cherche une langue forte et colorée capable de dénoncer la misère mais en lui faisant des pieds de nez, en usant de ruse et d’arrogance face à elle, une langue qui rit, se moque de son ennemi, danse autour de lui. C’est que trop souvent la misère se tait, n’a pas les mots, est empêchée. C’est que trop souvent on la commente, l’analyse, la décortique, avec de bonnes intentions, certes, mais avec une langue froide.
Rémi Chechetto, janvier 2011