Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Reporterre
A Aulnay, le Grand Paris sert à chasser les pauvres
Article mis en ligne le 29 septembre 2017
dernière modification le 28 septembre 2017

Le Galion, immeuble de la Cité des 3.000 d’Aulnay-sous-Bois, est destiné à la destruction. Et leurs occupants, pauvres, iront voir... ailleurs. Cette décision est contestée par des habitants, qui dénoncent la « gentrification » et l’absence de concertation de cette opération représentative du Grand Paris.

« Aulnay, c’est la 50e ville de France la plus peuplée, la 3e de Seine-Saint-Denis, débite-t-il tout en conduisant. Mais elle est divisée : au Sud, y’a les riches, et au Nord, les pauvres. Ça commence là. » Là, c’est de l’autre côté de la nationale, qui coupe la ville en deux. Les immeubles s’élèvent de plusieurs étages. Dans cette partie nord, les HLM dominent le paysage. (...)

Un, en particulier, se détache : le Galion. La barre, construite dans les années 1960, marque l’entrée du quartier de la Rose-des-vents. Ou plutôt de la « Cité des 3.000 ». Construite pour héberger les ouvriers de l’usine PSA d’Aulnay, elle est désormais réputée « difficile », « sensible », et a fait la une des médias au début de l’année, car c’est là qu’a eu lieu le viol supposé de Théo par des policiers.

« Le Galion, c’est un symbole, un patrimoine, un lieu de vie », défend Hadama. « C’est 150 logements, plusieurs dizaines de commerces, et un centre de danse de 500 adhérents ! » Mais désormais, les vitrines ont presque toutes baissé le rideau, quasiment tous les appartements sont vides. La destruction du Galion est programmée pour 2018. Pour construire quoi à la place ? « Je vous mets au défi de trouver un seul habitant qui le sache », lance Hadama Traoré. Effectivement, même des élus de l’opposition municipale nous expliquent ne pas avoir plus d’information. Quant à la mairie, elle n’a pas répondu à Reporterre malgré plusieurs relances. (...)

« On n’est plus que trois familles à y habiter, nous explique Alanna George, sur le trottoir devant la barre, tenant sa petite fille par la main. Ils nous demandent de partir depuis 2015, mais on n’a eu des propositions de relogement que pour des immeubles sans ascenseur, alors que mon mari est malade. On a refusé et on a reçu un avis d’expulsion en janvier. » Finalement, quelques coups de fil et contacts d’Hadama ont arrangé les choses. « On part bientôt », poursuit la dame. (...)

L’immeuble a subi des inondations, endommageant une partie de son plafond. « Le bailleur ne répare pas, et ne veut pas que je le fasse moi-même… C’est la misère, les charges sont aussi lourdes que le loyer, car on n’est plus que quelques-uns à payer pour l’électricité, les poubelles, le ménage. » Comme les autres commerçants encore ouverts, il considère que la somme proposée pour qu’il parte est trop faible : « Seulement un quart de ce que j’ai acheté ! Avec les charges d’acte, c’est comme s’il ne me restait plus rien à la fin, ils me mettent à la porte. » (...)

Juste devant le Galion, à la sortie du quartier des 3.000, la voirie a été refaite, et mène à un ensemble d’immeubles bas au crépi impeccable. Une laverie, un opticien, une boucherie, une boulangerie s’alignent à côté de l’Intermarché. « Il n’y a plus que 17 magasins contre des dizaines avant dans le Galion. Et, au-dessus, ce ne sont que des appartements en propriété, désigne Hadama. Y’a pas de HLM. Ils font de la gentrification », c’est-à-dire le remplacement de populations aux revenus modestes par des populations plus aisées (...)

« Malheureusement, quand on détruit on ne peut pas faire autrement que de reloger les gens, c’est douloureux pour les personnes de voir leurs souvenirs détruits d’un coup de dynamite », reconnaît Miguel Hernandez. « Mais il y a un accompagnement social des familles. Nous avons aussi mis en place des outils pour consulter les habitants, avec des conseils de quartier, et j’ai fait des ateliers, des balades urbaines », reprend Guy Challier. Des outils qui n’ont pas été repris par la nouvelle municipalité, assure son collègue :

« Elle n’a pas de pratique de la démocratie participative, elle est dans l’autoritarisme et le non-dialogue. »

« On ne dit pas “gentrification”, on dit “épuration sociale” » (...)