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l’Express
À Matignon, le malaise du personnel
Article mis en ligne le 25 mai 2018
dernière modification le 24 mai 2018

Edouard Philippe a perdu 6 secrétaires en un an. L’Express révèle un audit sur les conditions de travail rue de Varenne.

Il était 21 heures, la veille de ses vacances. La secrétaire s’est entendue dire, en substance : "Tu ne reviens pas demain. Je n’ai rien à te reprocher mais je crois que tu n’es pas à la hauteur et que tu es trop stressée." Bref, du balai pour cette collaboratrice du Premier ministre. Eh oui : cela se passe comme ça à Matignon, comme d’ailleurs dans les cabinets ministériels de tous les gouvernements qui se sont succédé ces dernières années. Sauf que depuis un an, ce sont en tout quatorze secrétaires, pas moins, qui ont quitté leur poste. Le secrétariat particulier d’Edouard Philippe, composé de quatre personnes travaillant en horaires décalés, en a perdu six : trois ont été écartées, et trois ont claqué la porte d’elles-mêmes.

Huit autres ont soit quitté l’équipe (où officient en temps normal une petite centaine de secrétaires mises à disposition des conseillers par la machine gouvernementale), soit été réaffectées, du jour au lendemain, d’un conseiller à un autre. (...)

"Les secrétaires de cabinet ont souvent changé de poste au gré de l’arrivée et des départs des conseillers, relate à L’Express un représentant du syndicat autonome des personnels des services du Premier ministre (SAPPM), qui a été officiellement saisi du sujet. Mais cela s’est amplifié depuis un an." Le principe, c’est que le personnel administratif est mis à disposition des politiques, et est principalement géré par le chef de cabinet du Premier ministre : en l’occurrence Anne Clerc, une ancienne d’Accor passée par l’équipe de Jean-Pierre Raffarin.

Cette dernière est secondée par une responsable du "bureau du cabinet", une structure intermédiaire entre les services administratifs et les "politiques" du cabinet. Du jour au lendemain, au gré des arrivées et des départs des ministres et de leurs conseillers, et aussi de leurs humeurs, le personnel fonctionnarisé peut ainsi être viré, déplacé, renvoyé, tout comme les contractuels, c’est la règle. Généralement, les personnes concernées sont recasées tant bien que mal - le cas des contractuels, lui, étant plus délicat à gérer.

En tout cas, de mémoire d’observateur des moeurs ministérielles, jamais le mouvement n’a atteint une telle ampleur. L’ambiance de travail est décrite comme lourde et particulièrement stressante, avec des engueulades. (...)

"Le rythme de travail est très soutenu, la charge pèse sur les secrétariats", justifie Anne Clerc. "Le travail en brigades induit des pertes d’informations et des bugs. Souvent, celles qui commencent quelque chose le matin n’en voient jamais l’aboutissement, qui est réalisé l’après-midi par d’autres. Cela peut être difficile à supporter."

En tout cas, L’Express peut révéler que cette situation tendue a nécessité qu’une société de conseil en entreprise, Reor, soit mandatée pour dresser un audit (voir fac-similé). Le document, daté de mars 2018, synthétise les réponses de 40% des conseillers du Premier ministre et de 90% des assistantes. Il semble révéler un climat pour le moins tendu au sein du cabinet, côté assistantes tout du moins (...)