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À Paris, une bibliothèque ferme ses portes face aux “conflits quotidiens”
Article mis en ligne le 4 février 2019

L’équipe de la bibliothèque Assia Djebar, située dans le 20e arrondissement de Paris, a décidé d’appliquer son droit de retrait le vendredi 1er février dernier et de ne pas rouvrir l’établissement « tant que des solutions réelles et pérennes ne seront pas proposées ».

Dans une lettre ouverte envoyée à la mairie de Paris, les bibliothécaires dénoncent un manque de soutien face aux « conflits quotidiens » au sein de l’établissement, situé dans une zone dite sensible de la capitale.

Ouverte en janvier 2018 au sein du XXe arrondissement de Paris, la bibliothèque Assia Djebar donne l’impression à son équipe d’être devenue « le réceptacle de la colère sociale, et d’être abandonnés par la mairie face à cette situation », peut-on lire dans cette lettre ouverte.

« Les conflits quotidiens, les relations tendues avec certains usagers, sont devenus trop durs, traumatisants, la peur s’invite dans la bibliothèque et nous poursuit parfois même dans la rue. Sans soutien de la part de notre hiérarchie, que pouvons-nous faire face aux menaces (“attaques au mortier”, “balle dans la tête”, “tout casser”), aux insultes, aux bagarres, à la consommation de stupéfiants dans l’établissement ? », explique l’équipe de la bibliothèque.

Selon cette dernière, la journée du jeudi 31 janvier a été particulièrement éprouvante : « Hier, nous avons fait face à des livres et élastiques qui volaient à travers le plateau, atteignant parfois usagers ou bibliothécaires, à des bouteilles jetées sur la façade et au refus de quitter la bibliothèque de la part des groupes en cause. »

Les bibliothèques dans les quartiers difficiles

Plus loin dans le courrier, l’équipe de la bibliothèque dénonce le manque de moyens ainsi que la gestion du personnel : « Cinq collègues sont partis avant même un an d’ouverture et deux autres départs sont imminents. Et désormais il semble que le nouveau mode de recrutement n’implique pas d’entretien préalable, mais le catapultage arbitraire par notre tutelle. »

Évoquant un budget d’acquisition « réduit de 30 % dès la 2e année d’ouverture » et de « multiples dysfonctionnements » du bâtiment, le personnel de la bibliothèque ne cache pas son malaise vis-à-vis du projet d’établissement derrière Assia Djebar : « Tout nous laisse croire qu’il s’agissait d’affichage politique à peu de frais, et que derrière on ne trouve que mépris. »

« La situation du quartier nous renforce dans notre conviction que la bibliothèque a du sens dans cet environnement », termine l’équipe de la bibliothèque, « mais nous sommes forcés de constater que sans moyens adaptés, sans accompagnement, nous ne pouvons assurer ce service public dans des conditions acceptables ». (...)

La situation de la bibliothèque Assia Djebar en rappelle une autre, toujours à Paris : dans le 18e arrondissement, la bibliothèque Václav Havel a connu plusieurs épisodes de violences, en juillet 2017, janvier et mars 2018, qui avaient entrainé la fermeture de l’établissement. Là aussi, le personnel se disait « démuni face à une telle tension » et avait raconté les faits dans une lettre ouverte.

Sur son blog, le syndicat CGT Culture de la Direction des Affaires Culturelles de la Ville de Paris annonce que « tous les syndicats de la Direction des Affaires Culturelles de la Ville de Paris vont demander un CHSCT extraordinaire sur cette situation ». Par ailleurs, les syndicats SUD Culture Paris et SUD-CT 75 se disent « alertés par la souffrance chronique subie par les agents » et réclament à la Ville de Paris « un service public culturel à la hauteur de ses ambitions ».