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Le Monde diplomatique
A partir des retraites, imaginer un salaire à vie
mercredi 8 septembre 2010, par Bernard Friot
Article mis en ligne le 10 septembre 2010
dernière modification le 9 septembre 2010

Dans « Le Monde diplomatique » de septembre, le sociologue Bernard Friot affirme que la logique actuelle du système de retraite, loin d’être obsolète, comme on voudrait le faire croire, mériterait au contraire d’être étendue, et permet d’imaginer une société où le travail serait libéré à la fois du marché de l’emploi et de l’emprise de la finance (lire « Retraites, un trésor impensé »). Il détaille ici sa proposition.

..Répartir, c’est une technique : on transforme immédiatement des contributions en prestations, sans passer par l’épargne. Ce contenant peut avoir des significations très différentes selon son contenu, et c’est pourquoi la question centrale est : que répartit-on ? Sont en conflit aujourd’hui le salaire et le revenu....

...L’enjeu actuel des réformateurs est de passer du salaire continué, qui est la réalité de la plupart des systèmes de pension en Europe, au revenu différé, qui caractérise les réformes italienne et suédoise des dernières années. On est toujours en répartition, mais elle a complètement changé de sens. ...

...Alors que le discours générationnel invente un rapport social imaginaire dans de dramatiques distinctions entre salariés, le salaire continué met à nu le rapport social capitaliste en le subvertissant et en montrant que l’emploi et la propriété lucrative peuvent être dépassés par le salaire universel...

...Nous retrouvons ici l’opposition déjà esquissée – et à mon sens au cœur du conflit de classes aujourd’hui – entre salaire et revenu. Elle nous offre un exemple incisif de la guerre des mots....

...Les prétendus « investisseurs » n’apportent absolument rien : ils disposent d’un droit de propriété lucrative qui leur permet de ponctionner, sous forme de monnaie, un partie de la valeur ajoutée en train d’être produite....

...Le salaire universel l’est au double sens de pour tous (chacun, de sa première entrée dans un collectif de travail à sa mort, a droit à une qualification et au salaire irrévocable qui va avec) et pour tout (l’investissement est financé par une part socialisée du salaire, ponctionnée sur la valeur ajoutée par une cotisation économique). Il se substitue au marché du travail et au droit de propriété lucrative. C’est un droit politique qui récuse l’imposture du capital comme acteur économique et qui qualifie les personnes, les posant comme les seules productrices et faisant des producteurs des acteurs politiques. Le salaire universel donne au travail la charge politique que le capitalisme lui refuse.