
Lui-même par trois fois agressé, l’écrivain égyptien constate, dans une tribune au « Monde », que si le wahhabisme a privé son pays, et plus largement le monde arabe, de son atmosphère de tolérance, il ne peut rien contre la diffusion des idées
(...) « Je suis athée… Les causes qui m’y ont conduit sont nombreuses : scientifiques, philosophiques, ou bien personnelles, mais je vous assure que l’athéisme me procure une paix spirituelle aussi totale que celle de la foi dans l’esprit des croyants. » Cela n’a pas été écrit par un Occidental, mais dans un article publié en 1937 par un mathématicien égyptien, Ismaïl Adham (1911-1940), sous le titre « Pourquoi je suis athée ? ».
Ismaïl Adham, qui a ensuite réuni ses articles dans un livre, n’a été ni arrêté ni traduit en justice ; il n’a pas subi de menaces ni d’agressions et a continué à vivre normalement, à donner des conférences, à fréquenter les cafés et les clubs et à discuter avec les gens. (...)
Il suffit de regarder n’importe quel film égyptien des années 1930 à 1960 pour voir une Egypte différente de celle d’aujourd’hui. Il n’y avait alors ni hidjab ni niqab, et toutes les femmes étaient dévoilées, y compris les étudiantes de l’université religieuse d’Al-Azhar.
Qu’est-il arrivé aux Egyptiens ? N’étaient-ils pas musulmans à l’époque où ils permettaient aux athées d’exprimer leurs idées ? Pourquoi l’Egypte (et le monde arabe) est-elle maintenant privée de cette atmosphère de tolérance et pourquoi les idées extrémistes et terroristes se sont-elles répandues ? (...)
La réponse est le wahhabisme. Après la guerre de 1973, la hausse du prix du pétrole a donné aux pays du Golfe un poids économique sans précédent. Leurs familles régnantes, étroitement liées aux cheikhs du wahhabisme, ont dépensé des milliards de dollars pour diffuser partout dans le monde la pensée wahhabite. (...)
Le wahhabisme prône la lecture la plus fermée et la plus belliqueuse de l’islam. Les wahhabites sont ennemis des libertés, des arts, des droits des femmes. Ils n’admettent pas la démocratie mais ils luttent pour instaurer le règne de Dieu. Or le wahhabisme est la base idéologique de l’islam politique. (...)
L’islamiste wahhabite croit que la religion est un modèle pour l’Etat et qu’elle lui impose le djihad (la « guerre sainte ») pour restaurer un califat islamique disparu en 1924. (...)