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l’Humanité
Apprentissage. Ces écoles qui surfacturent des formations fantômes
Article mis en ligne le 7 février 2021

Dans le supérieur, des écoles peu scrupuleuses ont inscrit en masse des jeunes dans des formations en alternance, en commerce, communication ou management, sans qu’ils aient d’employeur. Ces jeunes risquent de devoir des milliers d’euros de frais de scolarité.

« En septembre, j’ai eu la mauvaise surprise d’apprendre que je devais m’acquitter de 2 000 euros de frais de scolarité ! » s’exclame Marion (*). La jeune femme suit un « programme grande école » en alternance dans une prestigieuse école de commerce. La formation ayant débuté par trois mois de cours obligatoires, son contrat d’apprentissage de vingt-quatre mois dans une entreprise pharmaceutique n’avait pu commencer que mi-janvier, il court sur trois années scolaires. (...)

Le cas de Marion n’est malheureusement pas isolé. « Sur notre chat SOS Apprenti, un certain nombre de jeunes alternants se sont plaints : ils se sont vu demander des frais de scolarité de plusieurs milliers d’euros », dénonce Aurélien Cadiou, président de l’Association nationale des apprentis de France. « Il s’agit principalement de cursus en alternance menant à des diplômes bac + 3 à bac + 5 en management, communication, ou commerce. » (...)

Autre pratique litigieuse, l’exigence de frais d’inscription s’élevant de 500 à 1 000 euros. Dans une interview sur Public Sénat le 18 janvier, Élisabeth Borne, la ministre du Travail, s’est emportée contre ce type de pratique. « Ce n’est pas ça l’esprit de l’apprentissage, ce doit être gratuit. » Il n’est pas question, en effet, de faire payer au jeune la recherche de l’entreprise, cela figure explicitement dans les missions des CFA (centres de formation d’apprentis) détaillées dans l’article L. 6231-2 du Code du travail.

Élisabeth Borne promet des sanctions

La situation est particulièrement difficile pour les jeunes qui sont sur le point d’arriver à la fin du dispositif 6 mois sans contrat. (...)

Dans son interview du 18 janvier, la ministre du Travail évalue le nombre de ceux-ci à 11 000. Elle a annoncé que des contrôles sont en cours et que, si des fraudes sont constatées, des sanctions seront prononcées. (...)

Ces pratiques contestables ont été facilitées par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Celle-ci a simplifié les démarches pour ouvrir un centre de formation d’apprentis, elle a en effet supprimé l’autorisation administrative et l’obligation de convention avec la région, l’ouverture d’un CFA ne nécessite qu’une déclaration à la Direccte. Des écoles privées ont été officiellement reconnues CFA mais ne respectent pas le cadre de l’apprentissage. (...)

« Certains établissements font signer des contrats stipulant que toute année commencée est intégralement due, leurs formulations sont volontairement très ambiguës : les jeunes sans employeur ne savent pas s’ils sont stagiaires de la formation professionnelle en tant qu’apprentis ou étudiants ! » s’insurge Aurélien Cadiou. Dans le premier cas, quand ils arrivent au bout des six mois s’ils n’ont toujours pas d’employeur, ils arrêtent la formation sans rien devoir payer ; dans le second cas, ils doivent s’acquitter de frais de scolarité de plusieurs milliers d’euros.

Un contrat que nous avons pu consulter, celui d’une école de commerce qui propose une formation en « management et développement durable », joue sur une autre ambiguïté. Alors que ses plaquettes de publicité ou son site Internet annoncent qu’il est possible de suivre le cursus en alternance dans le cadre d’un contrat de professionnalisation ou d’un contrat d’apprentissage, le document que doivent signer les nouveaux étudiants ne mentionne plus que le contrat de professionnalisation. Pour l’école, c’est plus intéressant, car l’étudiant sera davantage en entreprise. (...)