(...) apprenant la nouvelle de l’attentat contre la mosquée de Bayonne commis par un ancien militant RN fan de Zemmour, éditorialistes et présentateurs cherchent à se dédouaner. Mais consacrent le reste du temps à parler communautarisme et radicalisation… sans s’interroger sur la leur.
« Tout le monde en prend pour son grade, même les médias, se lamente Pascal Praud au soir de l’attentat contre la mosquée de Bayonne. J’ai vu des réactions qui accusaient les médias de propager des messages de haine. » Non ? Qui a osé proféré de telles accusations ? « Je l’ai vu ! » C’est insensé. CNews propagerait des messages de haine ? Pourtant, Zemmour est amour. « Le fait d’en parler est parfois vécu de cette manière » De parler de quoi ? Ah oui, je me souviens, il me semble avoir entendu évoquer ces dernières semaines le voile, les musulmans, l’immigration, le terrorisme, la radicalisation, le voile, l’islamisme, le communautarisme, l’immigration, le voile, la radicalisation, les musulmans, l’islamisme, le voile, le terrorisme, le communautarisme, la radicalisation, le voile… Mais vraiment un tout petit peu. A peine quelques centaines d’heures sur CNews, LCI et BFMTV réunies. (...)
Pour sa défense, Pascal Praud explique : « C’est pas la même chose d’attaquer la religion musulmane que d’attaquer les musulmans. » Si les musulmans pratiquaient la religion musulmane, ça se saurait. (...)
« A chaque débat, objecte Rokhaya Diallo, la vie des femmes voilées change : regards de travers, agressions, crachats, injures… » David Pujadas la soupçonne de vouloir le censurer : « Vous voulez dire qu’il faut plus en parler ? » Si on ne parlait pas de voile, de quoi pourrait-on parler ? On ne va quand même pas bassiner nos téléspectateurs avec une révolution au Chili. (...)
« Oui mais sur les retraites, proteste David Pujadas, on en a fait deux cent cinquante ! » « Sauf que personne ne va s’en prendre aux retraités. » Ça ne saurait tarder. Des libéraux radicalisés pourraient bien incendier des Ehpad. (...)
Pour Romain Goupil, Jean-Michel Blanquer « n’avait pas à dire que le voile n’est pas souhaitable ». David Pujadas vole au secours du ministre : « Il exprime une vision. » « Si on ne peut même plus dire ça, c’est qu’on ne peut plus rien dire », se désole Julie Graziani, présentée par David Pujadas comme « éditorialiste à L’Incorrect ». Il omet de préciser que ce journal a été créé par des fans de Marion Maréchal qui ont organisé la « convention de la droite » pendant laquelle Eric Zemmour a appelé à « combattre l’invasion islamique » dans un discours retransmis par LCI. Preuve qu’on ne peut plus rien dire. (...)
Revoici l’infâme sondage de l’Ifop pour le JDD. « Une écrasante majorité, 80 % des Français [des sondés], estime que la question de la laïcité se pose différemment quand on parle de l’islam. » « 61 % pensent qu’il n’est pas compatible avec les valeurs de la société française. » D’où la nécessité d’attaquer des mosquées.
Pour arbitrer le débat, David Pujadas fait entrer un nouvel invité qu’il présente comme un expert incontesté, « Guylain Chevrier, vice-président du Comité laïcité République ». L’animateur omet de préciser qu’il est aussi contributeur du site Riposte laïque qui a pour profession de foi le « combat contre l’islam » et dont le directeur a été condamné pour incitation à la haine envers les musulmans. (...)
« Juste pour vous signaler qu’il y a eu des coups de feu tirés à la mosquée de Bayonne, il y a deux blessés », avertit Arlette Chabot deux heures plus tôt. Mais, comme son collègue de la tranche suivante, la présentatrice de LCI préfère rester sur le « contexte » : « Emmanuel Macron affirme sa détermination à lutter contre le communautarisme. » (...)
Arlette Chabot revient brièvement sur les mystérieux coups de feu à Bayonne. « Pour l’instant, on n’explique pas le geste. Il [l’auteur] semblerait présenter des troubles psychologiques. » Tout s’explique. « Je vais pas jouer les Cassandre, avertit André Bercoff, mais si on fait semblant qu’il n’y a pas de problème, ça ne peut que se multiplier. » Cela fait des semaines que l’on fait semblant de ne pas voir que les musulmans sont un problème, voilà qui explique le passage à l’acte du tireur de Bayonne. (...)
Si vous ajoutez la folie au cancer, vous obtenez fatalement un attentat contre une mosquée. « Voilà, l’attaque de la mosquée de Bayonne, on en reparlera, évacue la présentatrice. Mais d’abord le grand débat : islam, laïcité, communautarisme… l’actualité se percute parfois. » Tellement que les balles d’une arme à feu percutent le corps de musulmans. (...)
« Il aura peut-être fallu ce drame à Bayonne pour que certains Français se rendent compte qu’il n’est pas toujours facile d’être musulman », avance Eric Brunet. « Ce que vivent les gens au quotidien, nuance Gilles Clavreul, c’est rarement des agressions violentes. » On ne va tout de même pas se formaliser pour des stigmatisations, des humiliations, des discriminations quotidiennes.
« On a appris il y a quelques minutes ces tirs près d’une mosquée de Bayonne », annonce le présentateur de CNews, Patrick Boisfer, peu après 17 heures. « On sait que c’est un homme de 84 ans, inconnu des services de renseignement, qui était candidat en 2015 aux élections départementales. » Peu importe sous quelle étiquette. « Yves Lefebvre, du syndicat SGP Police, est-ce que vous avez de plus amples informations ? » « Non. » Tant pis, « on en vient à notre thème : communautarisme, Macron est-il dans l’impasse ? » Extrait du discours présidentiel : « Notre sujet, aujourd’hui, c’est d’identifier les personnes radicalisées. » Mais pas celles qui s’attaquent à des mosquées. (...)
Etrangement, l’émission de Zemmour n’évoque ni l’attentat de Bayonne ni le voile-communautarisme-radicalisation-terrorisme. Elle s’ouvre sur un triomphe féministe, « Christine Lagarde, première femme à la tête de la BCE ». Puis est abordé le fiasco de la filière nucléaire, Zemmour explique le ratage de l’EPR de Flamanville : « A force de tenir un discours écolo, on a perdu les compétences. » (...)
Ivan Rioufol prône la méthode bonapartiste : « En 1807 Napoléon a imposé au Grand Sanhédrin de se prononcer sur dix questions… » « On est au 21e siècle », s’oppose Abdallah Zerki, délégué général du CFCM, venu servir de punching-ball aux débatteurs. « C’est ce que je disais, y a plus de Napoléon donc il y a un défaut d’autorité à la tête de l’État. » Plus personne pour rétablir l’esclavage. La France est foutue.