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orient XXI
Au Liban, La Caravane passe… et le monde écoute Donner une voix aux réfugiés syriens
Article mis en ligne le 29 août 2016
dernière modification le 24 août 2016

Durant cinq semaines, La Caravane traverse le Liban, transportant de ville en ville des comédiens chargés de mettre en scène par le théâtre de rue différentes histoires de réfugiés syriens. Une manière singulière de faire entendre leurs voix et de tisser des liens entre Syriens et Libanais, dont les relations sont de plus en plus tendues.

Une fois immobilisée, La Caravane se déploie et, en l’espace de quelques minutes, une scène de théâtre est mise en place par des comédiens qui s’exécutent avec minutie. Du placement stratégique des enceintes à l’accrochage de la corde délimitant la scène en passant par le déballage des accessoires, les six artistes conduisent leurs travaux avec une rigueur acquise au fil de nombreuses performances. « La pièce de théâtre débutera à 16 h 30 », crie Ahmed S. au mégaphone. Petit à petit, un attroupement se forme. La voix d’Amir Al-Baher, venu de Homs, commence à émaner des baffles.

Depuis plus d’un mois, La Caravane sillonne le Liban d’est en ouest, effectuant des arrêts dans plusieurs villes et marchés, lors desquels les comédiens, improvisés ou professionnels, dévoilent une performance théâtrale basée sur huit histoires sonores. Ces récits provenant de réfugiés syriens ont été collectés lors d’ateliers organisés dans des camps par Sabine Choucair, l’initiatrice du projet. (...)

Si les réactions de l’auditoire s’avèrent parfois désagréables, « comme lorsque nous avons joué à Kefraya et que la moitié des Syriens dans le public est partie », se souvient Choucair, elles se révèlent la plupart du temps surprenantes. « À Kefraya, c’était la première fois que nous avions un mélange de Libanais et de Syriens dans l’audience, détaille-t-elle , et à la fin, les Libanais sont venus nous remercier pour le spectacle et se sont même excusés pour le comportement des Syriens ». Ce vendredi soir à Tripoli (au nord du Liban), Fadwa Annous, une spectatrice, n’en revient pas : « C’est la première fois que je vois du théâtre dans la rue, c’est super ! Il ne faut même pas payer et c’est ouvert à tout le monde ». (...)

La Caravane apparaît ainsi comme une forme novatrice pour créer des ponts entre les réfugiés syriens d’une part et la population libanaise d’autre part, le tout au sein d’un climat de crispation manifeste. Étant plus d’un million, les réfugiés syriens sont sujets à des couvre-feux nocturnes mis en places par les municipalités, et dont le nombre a été décuplé à la suite des huit attentats-suicides qui ont frappé le village d’Al-Qaa, au nord du pays, le 27 juin dernier. À ces mesures restrictives s’ajoutent des actes de racisme, de discrimination et d’agression. Dans la nuit du 5 au 6 juillet derniers, un camp de réfugiés syriens a notamment été incendié dans la région du Akkar, au nord du pays. (...)

Après le Liban, l’équipe des comédiens professionnels de La Caravane s’est rendue en Tunisie pour prendre part au Festival international de Nabeul ainsi qu’au Festival de rue, à Sfax, début août. Sabine Choucair aimerait ensuite emmener La Caravane en Europe afin d’y « organiser un casting avec des acteurs syriens, par exemple en France et à Berlin, puis faire un road trip durant deux mois et jouer les performances à un rythme soutenu. Il faut que ces histoires, universelles, soient entendues par les Européens qui ne se représentent pas trop ce qu’est la culture arabe ni d’où viennent ces réfugiés, estime l’organisatrice. (...)