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Attac33 Le Ptitgrain n°472
Au Yémen, traverser la rue n’est pas une solution
jean-Luc Gasnier
Article mis en ligne le 27 septembre 2018
dernière modification le 25 septembre 2018

Au jeune horticulteur au chômage qui l’interpelle sur sa situation lors des journées du patrimoine, Emmanuel Macron conseille de traverser la rue. Les cafés, hôtels, restaurants de la rue du Faubourg St Honoré ont certainement beaucoup de mal à trouver de la main d’œuvre, « ils veulent simplement des gens qui sont prêts à travailler ».

Comment peut-on mettre aussi peu de zèle dans la recherche d’emploi ? Le pays, c’est évident, souffre avant tout d’un manque d’engagement et de sens civique ; le niveau du chômage serait bien moindre avec un peu de bonne volonté.

Le confort et les aspirations personnelles doivent s’effacer devant l’impérieuse nécessité de participer au processus de production. Les aides sociales sans contrepartie encouragent l’oisiveté et privent les entreprises d’une ressource de proximité. Heureusement, bientôt, le « revenu universel d’activité » permettra d’y remédier en instituant une sorte de nouvel STO. Le service du travail obligatoire est remis au goût du jour par Emmanuel Macron. Le capital qui détruit les emplois réclame de plus en plus de travailleurs pauvres.

Et quelle idée saugrenue que de se former en horticulture alors même que tant d’industries éprouvent les pires difficultés à trouver de la main d’œuvre !

Pourquoi s’obstiner à vendre des fleurs quand on peut par exemple vendre des armes ? Dans le secteur de l’armement, florissant et dynamique, les offres d’emploi sont certainement abondantes. Avec 5, 2 milliards de dollars de livraison en 2017, la France est désormais le 3ème exportateur mondial d’armements en tous genres, derrière les USA et la Russie. Les conflits du Proche- Orient assurent à cette industrie un avenir florissant. Les juteux contrats passés avec les pays du golfe et en particulier avec l’Arabie Saoudite constituent un sacré vivier d’emplois et un espoir de réussite sociale pour des jeunes chômeurs qui accepteraient de « traverser la rue » et de consentir ce juste effort. Le Président et son ministre des affaires étrangères Jean-Yves le Drian ne ménagent pas leurs peines pour que ce secteur demeure pourvoyeur de main d’œuvre : la politique étrangère de la France défend avant tout les intérêts de certains domaines stratégiques et cela fait bien longtemps qu’elle n’a plus les moyens d’aller à l’encontre des intérêts de son industrie de l’armement.

Evidemment, cette politique produit des effets collatéraux. Au Yémen, noyé sous les bombes larguées par l’armée saoudienne, les enfants meurent par milliers et « une famine dévastatrice », selon les termes de l’ONU, menace désormais. Dans son discours du 27 août dernier devant les ambassadrices et ambassadeurs Emmanuel Macron n’a quasiment pas évoqué cette crise qui nous concerne pourtant au premier plan. ,

Au Yémen, les jeunes ont d’autres problèmes que celui de trouver un emploi, et ils ne peuvent pas traverser la rue pour les résoudre. Il faudrait migrer et traverser la Méditerranée, mais là, Emmanuel Macron ne peut vraiment rien pour eux.