
Face à l’afflux de réfugiés musulmans en provenance de Birmanie, Dacca envisage de déplacer ces populations menacées dans la baie du Bengale.
Une vaste galette boueuse et herbeuse qui émerge à une dizaine de mètres au-dessus des eaux limoneuses de la baie du Bengale. Voilà Thengar Char. Sur certaines cartes du Bangladesh, cette île formée il y a une dizaine d’années par les sédiments charriés par la rivière Meghna n’est même pas mentionnée. Les dernières photos prises par l’agence Reuters montrent des buffles y paissant devant des arbustes et un littoral terreux qui va mourir dans la mer. Sinon, rien. Pas de réseau téléphonique, ni d’infrastructures. C’est sur cette île de 2 400 hectares, soumise aux cyclones et aux inondations, que le gouvernement bangladais ambitionne de transférer plusieurs dizaines de milliers de Rohingyas. Ces musulmans privés de citoyenneté fuient l’ouest de la Birmanie, où ils sont victimes d’un apartheid de fait depuis une quarantaine d’années. Le Bangladesh espère ainsi trouver une issue à la pression migratoire qui s’est intensifiée ces dernières semaines. Mais le projet a tout d’une relégation dans un no man’s land terminus pour ces parias de l’Asie. (...)
Si en Birmanie les Rohingyas sont parfois moins bien traités que des animaux de compagnie, ils ne sont pas spécialement bienvenus non plus au Bangladesh. Fin janvier, Dacca a en effet dit redouter des problèmes « de loi et d’ordre », et la propagation de maladies si les réfugiés se mélangeaient à la population. (...)
Le gouvernement a donc ressorti du placard son plan de déménagement des Rohingyas à Thengar Char. A deux heures de bateau au sud du village de Hatiya, l’île est « uniquement accessible en hiver, et c’est un paradis pour les pirates », selon la description d’un responsable bangladais à l’AFP.