
Dans le 32e Baromètre de la confiance des Français dans les médias réalisé par Kantar pour La Croix, la crédibilité accordée aux différents supports et la perception de l’indépendance des journalistes sont au plus bas. Cependant, l’intérêt pour l’actualité remonte après trois années de baisse.
Insultes, menaces de viol, jets de projectiles, coups, scènes de lynchage… Après plusieurs agressions de journalistes, des agents de protection accompagnent des équipes de télévision ou radio lors de mobilisations de gilets jaunes. Une « escalade de la haine » dénoncée par l’ONG Reporters sans frontières, qui héberge sur son site la pétition #Libresdinformer, lancée par des collectifs de journalistes et de citoyens pour défendre le droit d’informer.
Sans surprise, dans ce contexte de crise sociale où la presse est prise à partie, les indicateurs du 32e Baromètre de la confiance dans les médias réalisé par le groupe Kantar pour La Croix sont en berne. (...)
La radio, traditionnellement jugée comme le moyen d’information le plus fiable, sort à peine la tête de l’eau (avec 50 % de niveau de confiance, – 6 points sur un an), devant la presse écrite (à 44 %, – 8 points), la télévision (à 38 %, – 10 points), et Internet (à 25 %, comme en 2018). (...)
« Le mouvement des gilets jaunes a eu un effet dévastateur sur la télévision, qui est à son plus bas niveau historique », souligne Carine Marcé, directrice associée à Kantar Public (ex TNS Sofres), notamment auprès des 18-24 ans (28 %) et des employés (29 %), deux catégories globalement très méfiantes.
« Les “intellos” n’ont pas les mêmes sources d’information que les milieux populaires »
Paradoxalement, les médias auxquels les Français accordent le moins de confiance sont ceux qu’ils utilisent le plus pour s’informer. (...)
On ne s’informe plus de la même façon selon l’âge et le niveau socioculturel. « Il y a un décrochage important entre les milieux culturels et les niveaux d’éducation, observe le sociologue Jean-Marie Charon. Les plus âgés et les moins diplômés regardent encore très majoritairement le petit écran. Les “intellos” n’ont pas les mêmes sources d’information que les milieux populaires : ils écoutent la radio et s’informent sur les sites de la presse écrite et auprès des médias créés sur Internet. Il y a bel et bien une information à deux vitesses, qui pose plus que jamais le débat de la qualité de l’information. (...)
Cette fracture médiatique s’est encore accentuée à l’occasion du mouvement des gilets jaunes. Interrogés sur leurs modes d’information lors de cette crise sociale, les sondés citent dans l’ordre les journaux télévisés des chaînes généralistes (à 64 %, et très majoritairement chez les moins diplômés), suivi de la radio (à 38 %, citée à 57 % chez les cadres) et des chaînes d’infos (à 37 %), de Facebook (26 %, surtout chez les jeunes et les employés), des grands titres de la presse quotidienne (17 %, contre 31 % chez les cadres), des sites et applications de la presse écrite (15 %), des médias uniquement en ligne comme Mediapart (à 6 %, et jusqu’à 10 % chez les plus diplômés). (...)
De loin, les plus mécontents sont ceux qui s’informent sur Internet (à 61 %) et les sympathisants de La France insoumise (67 %) et du Rassemblement national (66 %).
Une plus grande convergence apparaît dans l’appréciation détaillée du traitement de ce mouvement. (...)
23 % des sondés justifient les critiques et l’agressivité envers les journalistes (...)
L’utilité du métier n’est cependant pas niée. Critiqués voire honnis, les journalistes arrivent en tête des acteurs « qui devraient agir contre la propagation des fake news (ou infox, NDLR) » (à 37 %), devant les organes de contrôle des médias (35 %), les citoyens eux-mêmes (31 %) et le gouvernement (23 %).
Actualité : entre jeunes et seniors, le grand écart
Un manque de terrain et un trop-plein de « journalisme de commentaire »