
Ouverture à la concurrence oblige, l’exploitation des barrages hydroélectriques va être privatisée. Un premier appel d’offres sur une cinquantaine de barrages sera lancée après les élections. Cahier des charges flou, tentation de spéculer sur la production d’électricité, gestion des cours d’eau privatisée, incertitudes sur le statut des salariés, questions autour de l’entretien et de la sécurité des ouvrages… Les conséquences de cette privatisation rampante pourraient être lourdes.
(...) L’ouverture à la concurrence pour la gestion de ces ouvrages a été actée en 2008 par la majorité UMP à l’Assemblée. Le lancement des appels d’offres est attendu pour cette année, sans doute après les élections. 49 ouvrages hydroélectriques, regroupés en 10 concessions, sont concernés. Les nouveaux exploitants en hériteront pour trente à quarante ans. « On entre dans un système de recherche de profit, on risque de réduire le personnel compétent, avec un recours accru à la sous-traitance et à l’externalisation », craint Robert Gérenton, animateur du collectif hydraulique de la CGT.
Aucune consultation des partenaires sociaux n’a été réalisée avant la décision, il y a deux ans, de l’ouverture à la concurrence de cette cinquantaine d’ouvrages hydroélectriques. Ni depuis d’ailleurs… (...)
Dans le cahier des charges qui encadre la cession des concessions, il n’y a, pour le moment, aucune clause de protection des salariés. (...)
Cette ressource s’avère particulièrement utile aux heures de pointe, quand la demande menace de dépasser l’offre. C’est pourquoi Robert Gérenton pointe « les risques de spéculation, en période de froid, par exemple. Il pourrait être tentant, pour les opérateurs privés, de turbiner et de produire en fonction du prix du marché et non plus en fonction de la demande ». Un risque qui existe déjà, GDF-Suez étant partiellement privé
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Au-delà de l’accès à l’électricité, se pose le problème de l’accès à l’eau. (...)
Ces diverses activités sont organisées en concertation, parfois longues et fastidieuses, entre professionnels, associations diverses et élus. Mais cela fonctionne.
Le cahier des charges, actuellement rédigé par des cabinets privés – le ministère ayant (forcément) externalisé la mission –, ne semble pas très en pointe sur ces réalités quotidiennes très compliquées du « droit à l’eau ». Et pour cause : les personnes qui le rédigent ne sont pas sur place ! La ponction des réserves hydrauliques « pour l’irrigation de terres agricoles pourrait, elle aussi, devenir payante », ajoute Robert Gérenton. Précisons enfin que certains barrages de montagne sont des réserves d’eau potable. « La maîtrise publique de l’eau est finalement confisquée », résume Anne Debrégeas. Ce qui est quand même légèrement inquiétant. (...)
Les possibles conséquences de la privatisation des barrages ne semblent pas, pour le moment, beaucoup agiter les campagnes. « Les gens ne se rendent pas compte », pense Fabrice Coudour. « C’est un milieu de travail très éclaté », ajoute Anne Debrégeas. Souvent, les équipes sur chaque barrage sont restreintes. Ce n’est pas facile de les mobiliser. Certaines collectivités se voient parfois proposer une entrée au capital par les éventuels repreneurs. Et se retrouvent coincées pour critiquer ensuite la privatisation en marche.
Une privatisation que les Espagnols ont contré, en renouvelant in extremis les concessions à leur exploitant public. « Et que les Italiens ont contournée en confiant les concessions à leurs régions », note Robert Gérenton. En France, les députés UMP ont décidé d’aller au bout de la logique néolibérale (...)