
Alors que le précédent gouvernement avait décidé de faire de l’installation des boîtes noires une mesure temporaire, prenant fin en 2018 si l’évaluation du dispositif n’est pas concluante, la nouvelle équipe propose de les conserver deux ans de plus. Sans bilan préalable.
(...) C’est ce que montre un amendement déposé par le gouvernement dans le cadre du projet de loi sur la sécurité intérieure et le terrorisme. Au lieu de s’en tenir à la date déterminée au départ, à savoir le 31 décembre 2018, l’exécutif propose de repousser cette échéance au 31 décembre 2020. Et cela, alors qu’aucun bilan n’a été tiré, ce qui devait être la condition préalable.
« Il apparaît que le bilan qui pourrait être tiré de la mise en œuvre de cette technique de recueil de renseignement au 30 juin 2018 ne permettra pas au Parlement de se prononcer de manière satisfaisante sur l’opportunité de pérenniser cette technique ou d’y mettre fin », lit-on dans l’exposé des motifs. Jugeant la date initiale « prématurée », le gouvernement propose de décaler la discussion de deux ans.
Une demande à laquelle tous les élus n’entendent pas se rallier : comme le note l’avocat Alexandre Archambault, les députés Les Insoumis veulent supprimer les boîtes noires dans leur amendement, du fait de « l’absence d’éléments suffisamment probants produits par le gouvernement quant à l’utilité et l’efficacité réelle de ces dispositions », et « ainsi revenir à l’état antérieur du droit ».
Il y a deux ans, le précédent gouvernement justifiait la nécessité de déterminer une date de fin à cause du « caractère novateur du mécanisme ». Un vocable que reprend aujourd’hui l’exécutif, tout en admettant avec un art consommé de l’euphémisme qu’il a pu susciter « des craintes ». Comme le rappelle l’exposé des motifs des Insoumis, plusieurs organismes s’étaient élevées contre ce dispositif :
« L’avis circonstancié de la Commission nationale consultative des droits de l’homme dénonçait d’ores et déjà l’impréparation du texte, l’effet exclusif d’affichage qui ne pouvait justifier des atteintes si sévères, et demandait ainsi le retrait d’une grande majorité des dispositions du texte », rappellent-ils. Ils citent aussi l’Observatoire des libertés et du numérique et le Défenseur des droits. (...)