Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
les jours
Bolloré : Europe 1 à un dawa de la grève
Article mis en ligne le 18 juin 2021

Un brusque jet de vapeur a jailli ce jeudi matin de la cocotte-minute qu’est devenue la rédaction d’Europe 1, pressurisée entre une direction actuelle qui ne lui dit rien et un déjà patron, Vincent Bolloré, qui semble tirer toutes les ficelles de son avenir. Il s’en est même fallu d’un rien pour que tout pète en direct à l’antenne de la station du groupe Lagardère.

C’est le directeur de l’information Donat Vidal Revel qui a allumé la mèche en annonçant la mise à pied d’un journaliste, Victor Dhollande, jusqu’au 30 juin, date de son entretien, comme dit la formule, « préalable à sanction pouvant aller jusqu’au licenciement ».

Donat Vidal Revel a parlé du comportement « pas acceptable » de ce journaliste qui, pendant sa mise à pied, « doit réfléchir à ce qu’il a fait ». Ce qu’il a fait ? Il s’est embrouillé, la veille, lors d’une assemblée générale, avec une salariée des ressources humaines, lui reprochant d’enregistrer les propos échangés pour les rapporter à la direction. Lors d’une rencontre jeudi après-midi entre élus du personnel et direction, celle-ci a dit que la sanction n’avait rien à voir avec l’incident en AG mais de plusieurs faits antérieurs, notamment une récente altercation avec la direction de la rédaction. La mise à pied annoncée par le directeur de l’information avait déjà enflammé la rédaction, Patrick Cohen, en charge de la tranche 12 h 30-13 heures, annonçant que, pour protester, il ne présenterait pas son émission, avant de renoncer.

À l’issue d’une nouvelle AG jeudi après-midi, à l’unanimité, les salariés ont demandé que la direction annule la procédure contre Victor Dhollande avant vendredi 13 heures, sinon c’est la grève. « Oui, c’est un bordel, témoigne un journaliste d’Europe 1. Je me demande comment ça ne peut pas exploser d’ici le 30… »

Lire aussi :

Radio : menace de grève à Europe 1, de nouveau en pleine tourmente

La tension est montée d’un cran jeudi chez Europe 1, les journalistes redoutant depuis des mois une prise de contrôle de la station du groupe Lagardère par son actionnaire principal, le milliardaire Vincent Bolloré.

À l’issue d’une assemblée générale, les salariés ont menacé de se mettre en grève si la direction ne revient pas sur une procédure de sanction visant un journaliste. Mis à pied jeudi, ce journaliste est « convoqué pour un entretien préalable » pouvant « aller jusqu’au licenciement », a expliqué Olivier Samain, délégué syndical SNJ.
Procédure disciplinaire (...)

Malgré la mobilisation de l’intersyndicale SNJ, CGT, CFTC et FO, la procédure disciplinaire a été maintenue. La direction invoque ses comportements antérieurs, selon un participant de l’assemblée générale. Celle-ci a posé un ultimatum à la direction, jusqu’à vendredi 13 heures, a indiqué Olivier Samain. Et « menace de déclencher un arrêt de travail », a ajouté l’autre source.

Cette crise éclate dans un climat tendu, au sein d’une rédaction déjà « déprimée ». Par le plan de départs volontaires engagé au printemps pour supprimer une quarantaine de postes et redresser les comptes de la radio, dont les audiences peinent à remonter.

Mais aussi par les synergies que la direction veut développer avec CNews, chaîne d’info du groupe Canal+, filiale de Vivendi, contrôlé par Vincent Bolloré, comme elle l’a annoncé aux salariés en mai.
Refus de devenir un média d’opinion

Dans une tribune publiée jeudi sur le site du Monde, la société des rédacteurs d’Europe 1 et l’intersyndicale ont exprimé leurs inquiétudes, refusant « de devenir un média d’opinion » à « l’aube d’une année électorale ».

« En liant son sort à une chaîne (NDLR : Cnews) qui s’illustre à longueur de journée par un activisme politique fortement ancré à droite, voire parfois à l’extrême droite, Europe 1 va perdre ce qui lui reste de plus précieux : son capital de crédibilité auprès des auditeurs », estiment-ils.
Départs en série

Pour l’énième refonte de sa grille, la radio, qui va notamment se séparer de Pascale Clark et d’Anne Roumanoff et voir partir Julian Bugier, a également signifié à Matthieu Belliard qu’il ne présenterait plus la matinale à la rentrée. C’est Dimitri Pavlenko, journaliste de Radio classique et intervenant de « Face à l’info » aux côtés d’Eric Zemmour sur CNews, qui tient la corde pour le remplacer.

Un journaliste de la radio évoque une « dérive sur le fond », avec une « très forte droitisation de la ligne éditoriale se profile », amorcée par le recrutement à la rentrée 2020 d’un cadre du magazine Valeurs Actuelles, Louis de Raguenel, comme adjoint au service politique, et illustrée par « la liberté totale » de Sonia Mabrouk, figure de CNews. S’y ajoute désormais, avec la mise à pied de son confrère, « une dérive sur la forme » avec « un management par la terreur ».