
Sur leur plateau télé, les éditorialistes de CNews se gargarisent d’inviter des climatosceptiques, « héros de la liberté » contre le « totalitarisme vert ». La chaîne de Bolloré donne un porte-voix aux franges les plus réactionnaires de notre société, qui enchaînent les contrevérités scientifiques sans aucune contradiction.
Grâce à CNews et à son patron milliardaire, Vincent Bolloré, le climatoscepticisme prospère tranquillement et bénéficie d’une tribune de grande ampleur. La chaîne d’informations en continu — ou plutôt devrait-on dire la chaîne d’opinion — a fait de la critique des écologistes sa marque de fabrique. Une approche démagogique, réactionnaire et révisionniste qui alimente le buzz et conquiert des parts d’audimat avec ces prises de position caricaturales.
Récemment, ses éditorialistes ont encore forcé le trait. Dans l’émission hebdomadaire « Les points sur les i » du 4 juillet dernier, leur antiécologisme primaire a pris un tournant conspirationniste. Décriant les travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), ils sont allés jusqu’à se demander si le réchauffement climatique n’était pas « une invention politique pour culpabiliser l’Occident » et faire avancer « la cause racialiste ».
« Un climatofaussaire » invité à une heure de grande écoute
Sur le plateau, le chroniqueur Ivan Rioufol, également éditorialiste au Figaro, avait invité le spécialiste de la sécurité routière Christian Gérondeau. Depuis sa retraite, l’ex-haut fonctionnaire de 83 ans est parti en croisade contre « le terrorisme intellectuel » des écolos. (...)
Grâce à CNews et à son patron milliardaire, Vincent Bolloré, le climatoscepticisme prospère tranquillement et bénéficie d’une tribune de grande ampleur. La chaîne d’informations en continu — ou plutôt devrait-on dire la chaîne d’opinion — a fait de la critique des écologistes sa marque de fabrique. Une approche démagogique, réactionnaire et révisionniste qui alimente le buzz et conquiert des parts d’audimat avec ces prises de position caricaturales.
Récemment, ses éditorialistes ont encore forcé le trait. Dans l’émission hebdomadaire « Les points sur les i » du 4 juillet dernier, leur antiécologisme primaire a pris un tournant conspirationniste. Décriant les travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), ils sont allés jusqu’à se demander si le réchauffement climatique n’était pas « une invention politique pour culpabiliser l’Occident » et faire avancer « la cause racialiste ». (...)
ll affirmera d’ailleurs, au cours de l’émission, qu’« on est sur une courbe de l’ordre de 1 °C par siècle, qui monte, mais qui peut descendre […] Ces fluctuations ont toujours existé. 1 °C par siècle, il n’y a pas de quoi affoler qui que ce soit ». Une enquête commune de Mediapart, Reporterre, Bastamag, la revue Projets et Politis, réalisée en 2019, avait classé Christian Gérondeau parmi les « climato-faussaires » : l’avant-garde du front anti-écolo qui ne « désarme pas », en continuant « de considérer la question du dérèglement climatique comme un sujet de débat et en propageant l’idée que le Giec se fourvoie dans une fausse science ». En 2019, le retraité faisait partie des quarante signataires français d’une pétition remise aux dirigeants de l’Organisation des Nations unies assurant qu’il n’existe pas « d’urgence ou de crise climatique ». (...)
Sur le plateau de CNews, l’homme a été accueilli à bras ouverts. Ivan Rioufol, qui pourfend lui aussi dans ses chroniques « l’écologisme qui menace la France » ou « la jeunesse manipulée des marches climat » a décrit Christian Gérondeau comme un résistant. (...)
Pendant quinze minutes, l’essayiste a déroulé les thèses des climatosceptiques sans aucun contradicteur et devant plus de 200 000 téléspectateurs. Selon lui, la montée des eaux ne représenterait que quelques millimètres par an, soit à peine une dizaine de centimètres en cinquante ans. Bref, « un phénomène bien moins important que la marée du Mont-Saint-Michel […] Ce n’est pas un tsunami, même pas une vaguelette », déclara-t-il avant de minimiser plus tard le dôme de chaleur qui étouffe l’ouest du Canada. « Ce sont des événements ultralocalisés. Figurez-vous que j’ai une partie de ma famille à Montréal, qui a plutôt froid. » Montréal, cette ville à 5 000 kilomètres de Vancouver. (...)
Au cours de l’émission, l’essayiste, comme avant lui ses confrères climatosceptiques Claude Allègre et consorts, s’est plaint d’être « ostracisé ». Ivan Rioufol en a ajouté une couche. « Vous êtes une des rares personnes qui dénoncent l’imposture de l’idéologie écologiste. Comment cela se fait-il qu’on ne vous entende pas plus ? » Heureusement, il y a CNews. Évidemment. Et tous les autres médias réactionnaires. Christian Gérondeau en est d’ailleurs une coqueluche. Il y a deux semaines il se trouvait sur Sud Radio, il y a trois semaines sur les sites Contrepoints et Atlantico.
Des signalements envoyés au Conseil supérieur de l’audiovisuel
L’émission a fait bondir les climatologues. La coprésidente du Giec Valérie Masson-Delmote a déclaré l’avoir signalée au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). « Cette émission de télévision a propagé un ensemble spectaculaire de fausses informations à une heure de grande écoute », a-t-elle regretté sur Twitter.
Le phénomène n’est pas nouveau. Sur CNews « l’écolo bashing » et les contrevérités sont monnaie courante. (...)
Ces signalements n’ont pas l’air d’inquiéter la direction de CNews. En réalité, le tournant très conservateur de la chaîne rapporte. Pour la première fois le 4 mai dernier, CNews dépassait BFMTV sur une journée : 2,7 % de parts d’audience pour l’antenne de Bolloré contre 2,5 % pour BFM. Et la percée s’est répétée les 6, 12 et 19 mai. (...)