
Il n’y avait pas de mots assez forts, ce jeudi matin à la mairie d’Angres, pour qualifier les faits. Maryse Coupin, ancienne sénatrice, maire de la commune, et les membres du collectif Fraternité Migrants bassin minier 62, ont expliqué les événements qui viennent de bouleverser la vie et la famille d’une jeune maman, infirmière, très engagée dans l’aide aux migrants. Elle a été mise en garde à vue pendant 33 heures en raison de l’aide qu’elle apporte aux personnes en situation irrégulière. La maire et les bénévoles se sont dits « ndignés, révoltés ».
Il y a deux jours, à six heures du matin, la jeune femme a été interpellée chez elle. Une arrestation qui s’est faite certes dans « des conditions respectables », mais il n’en reste pas moins que ses enfants ont été réveillés par la police et qu’ils sont très choqués, que sa maison a été fouillée, ses ordinateurs et téléphones portables, emmenés. Beaucoup moins respectables par contre les conditions de garde à vue, si on en croit le collectif. L’infirmière a passé la nuit sur un lit en béton, sans couverture.
L’interpellation de cette bénévole entre dans le cadre d’une enquête internationale. Il lui est reproché, déplore-t-elle, « d’avoir de bonnes relations avec les passeurs », d’avoir effectué « des voyages en Angleterre pour les voir ». Trois écoutes téléphoniques prouveraient que « des Vietnamiens lui demandent de passer une personne ». La police lui reproche également ses « passages très fréquents au camp ». L’infirmière apporte en effet très souvent des soins, du temps, de l’eau… à des hommes et des femmes parfois très jeunes, parfois dans un état de grande fragilité, parfois blessés, parfois malades. Après des mois, voire des années d’errance, ils se posent là, non loin de la station d’autoroute, le temps de trouver le camion qui leur permettra d’atteindre ce qu’ils considèrent être leur eldorado, l’Angleterre. Les neuf migrants qui étaient au camp mardi matin ont été arrêtés également. Sept fourgons de police les attendaient. Ils ont été emmenés sur le site de la Paf (Police de l’air et des frontières) de Lille. Sept ont déjà été relâchés « avec un plan pour rejoindre Angres ! » s’est exclamée une bénévole, dénonçant le double langage de la police. (...)
Maryse Coupin s’est dite scandalisée non seulement parce que la Paf a fait irruption dans sa commune sans qu’elle ait été prévenue, mais aussi parce que l’arrestation des Vietnamiens a été filmée par la police et diffusée sur TF1. « C’est de la récupération ! » a argumenté un bénévole. Il n’est pas normal qu’un média diffuse des images tournées dans le domaine privé (le camp est sur un terrain communal), sans autorisation, a-t-elle dit en l’espèce, et « surtout sans les avoir vérifiées » a noté Benoît Decq, adjoint au maire de Bully-les-Mines et membre du collectif. Mme Coupin s’est encore interrogée : « Où sont nos valeurs ? Est-ce un crime aujourd’hui de vouloir aider les autres ? »