
Depuis plus d’un an, une vague de censure traverse les États-Unis. Dans les bibliothèques publiques comme scolaires, des centaines de titres sont écartés. Pourtant, cette pratique n’est pas nouvelle dans l’Amérique puritaine. Susan Kuklin, dont l’ouvrage Beyond Magenta figure à la 10e position du classement des livres les plus contestés en 2021 selon l’American Association Library, l’a appris à ses dépens.
En 2014, l’autrice et photographe américaine Susan Kuklin publie aux éditions Candlewick Beyond Magenta : Transgender Teens Speak Out (les adolescents transgenres s’expriment), un recueil de témoignages de six adolescents membres de la communauté transgenre et non-binaire sur leurs luttes et expériences dans une quête de définition de leur identité.
L’année suivante, l’American Association Library, plaçait l’ouvrage dans sa liste des ouvrages les plus contestés aux États-Unis. Pour le média américain National Public Radio, ou NPR, Susan Kuklin revient sur cet épisode de sa vie d’écrivaine et de passeuse de parole. (...)
“Montrer qu’ils ne sont pas seuls”
Pourtant, cette dernière avait reçu de nombreux retours positifs en premier lieu. « Les six participants à Beyond Magenta ont choisi de me parler pour trois raisons principales : ils voulaient se définir publiquement dans leurs propres termes, ils voulaient éduquer les autres et ils voulaient faire savoir aux autres jeunes dans des situations similaires qu’ils ne sont pas seuls. Au moment de la publication, des jeunes et pas mal de parents m’ont écrit pour me remercier de l’avoir publié ».
Plus encore, un lycéen issu d’un milieu rural et conservateur avait fait part à Susan Kuklin que la vue de la couverture de Beyond Magenta, sur laquelle un adolescent lui ressemblait étrangement, lui avait fait partir ses idées suicidaires. « En feuilletant les pages du livre, ils y ont trouvé un prénom qui était aussi le leur. C’était un signe - ils n’étaient pas seuls ».
Entre censure et autocensure
Un certain soir, l’autrice tombe sur un tweet incendiaire sur son ouvrage. Puis un autre, et encore un autre. Le livre était devenu viral dans une certaine communauté anti-LGBT. « Je me suis sentie dans un autre monde. Effrayant. Faux. Puis, à l’approche des élections, des politiciens cyniques et cruels ont pris le train en marche de la lutte contre les transgenres afin de mobiliser les électeurs ». (...)
Quelques années plus tard, la situation des ouvrages relatifs à la communauté LGBTQIA+ sont toujours sujets à la censure et à l’indignation. Selon le rapport de 2022 de l’American Library Association, 6 des 10 livres dont les appels à la censure sont le plus fréquent en 2021 sont des ouvrages avec une thématique ou des témoignages de personnes LGBTQIA+. (...)