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Mediapart
Commando de la fac de Montpellier : en appel, le parquet droit dans ses bottes
#commando #extremedroite
Article mis en ligne le 10 décembre 2022

Quatre prévenus étaient jugés en appel pour leur implication dans la violente évacuation de la fac de droit de Montpellier en 2018. Le procureur a demandé la confirmation des condamnations prononcées en première instance. L’ex-doyen, qui n’avait pas fait appel, a été désigné comme l’artisan du commando.

– Minimiser, nier et faire endosser la responsabilité à un autre : telle est la ligne de défense déployée par les prévenus, jugés devant la cour d’appel de Montpellier, ce vendredi 9 décembre 2022. Leur stratégie n’a pas payé. Le procureur s’est dit convaincu de leur culpabilité et a requis la confirmation de leurs peines. Le jugement a été mis en délibéré au 28 février 2023.

Ils sont quatre, sur les sept condamnés en première instance, à avoir interjeté appel. L’ex-professeur de droit Jean-Luc Coronel de Boissezon et sa compagne Patricia Margand, Thierry Vincent, un militaire à la retraite, et Martial Roudier, fils du fondateur du groupuscule identitaire de la Ligue du Midi.

Les trois premiers ont, en juillet 2021, été condamnés à six mois de prison ferme. Le dernier, à un an ferme. Le professeur Coronel avait également écopé de l’interdiction d’exercer dans la fonction publique pendant un an. Sur ce dernier point, Serge Cavaillez, le procureur, a aussi demandé la confirmation de la peine. (...)

Les quatre prévenus étaient rejugés pour leur participation au désormais tristement célèbre « commando » de la fac de droit de Montpellier. Dans la soirée du 22 au 23 mars 2018, un groupe armé de planches de bois et d’un taser avait fait irruption dans un amphithéâtre pour déloger plusieurs dizaines d’étudiant·es qui protestaient contre la loi relative à l’orientation et à la réussite éducative.

Une évacuation brève – à peine deux ou trois minutes – d’une grande violence, documentée par une série de vidéos (voir notre article). Plusieurs étudiants avaient été blessés, notamment à la tête.

L’ancien doyen Philippe Pétel, condamné en 2021 pour complicité de ces violences, avait écopé de 18 mois de prison avec sursis et d’une interdiction d’exercer dans la fonction publique pendant deux ans. N’ayant pas fait appel, il n’était pas présent à l’audience, ce vendredi.

Mais son nom et surtout son implication ont abondamment nourri les débats. (...)

Des sympathisants ou militants d’extrême droite (...)

Le soir des violences, la compagne du professeur Coronel l’avait rejoint à la fac, accompagnée de ses amis, des militants ou sympathisants d’extrême droite. Ceux-là mêmes qui vont participer à l’évacuation manu militari de l’amphithéâtre. Quelques heures plus tôt, ils assistaient tous ensemble à une conférence de la Manif pour tous contre la PMA (procréation médicalement assistée), au château de Flaugergues, à Montpellier. (...)

Concernant le professeur Coronel, si sa peine est confirmée, il ne pourra pas réintégrer la fac de droit de Montpellier en 2023. Mais tout dépendra de la décision du tribunal.

Car sur le volet disciplinaire, la révocation à vie décidé en première instance a été réduite en appel à quatre ans d’interdiction d’enseigner. Ce qui pourrait lui permettre de revenir en début d’année prochaine. Le ministère de l’enseignement supérieur et l’université, qui ne veut plus le voir dans ses rangs, ont porté l’affaire devant la Cour de cassation, mais le pourvoi n’est pas suspensif.

Une cinquantaine de personnes se sont rassemblées devant la cour d’appel de Montpellier, en marge du procès, contre sa possible réintégration et pour une sanction pénale lui interdisant d’enseigner. Selon Jean-Jacques Gandini, de la Ligue des droits de l’homme, la présence de Jean-Luc Coronel face à des étudiant·es pose un sérieux problème. « Il est d’extrême droite. Ça le regarde, bien sûr. Mais il est chargé d’enseigner le droit et toutes les valeurs que cela représente. »

Il cite en exemple la présence du professeur lors de la manifestation d’extrême droite réclamant « justice pour Lola », en octobre dernier, et récupérant le drame de cette enfant suppliciée à Paris. (...)

Jean-Jacques Gandini souligne aussi que Coronel a participé, début décembre, à un « Forum de la dissidence », en compagnie d’une partie de l’extrême droite française et dont la tête d’affiche était Renaud Camus, théoricien du « grand remplacement ».

C’est le média montpelliérain Le Poing qui a repéré la participation du professeur de droit. (...)

« Ce n’est pas un dossier politique mais il a quand même des connotations politiques, conclura l’avocat représentant l’université, dans sa plaidoirie. On prône la réaction par la violence et, pour certains, on s’en félicite. Je n’ai pas entendu beaucoup de regrets, j’ai entendu beaucoup de minimisation. »