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Association Autogestion
Covid-19 : un virus très politique
Article mis en ligne le 16 mars 2020
dernière modification le 15 mars 2020

(...) Il y a quelques mois, avant que ne s’engage la bataille pour la défense des retraites, dans la lutte sur la question des urgences et des moyens de l’hôpital public, certains collectifs de défense de l’hôpital se disaient prêts à élaborer le budget de l’hôpital. Revendiquer l’élaboration du budget, c’est d’une certaine manière revendiquer le pouvoir. Quelque part, il s’agissait de revendiquer le pouvoir pour les citoyen·nes, le droit d’évaluer les besoins et d’organiser la distribution des soins et la gestion des ressources.

La crise du système de santé n’a évidemment pas disparu avec la crise sanitaire. Bien au contraire. Non parce que le gouvernement ne fait rien, mais parce que ce qu’il fait est tardif, peu cohérent, faible et peu intelligible. Une raison à cela : ce gouvernement porte (avec ses prédécesseurs) la responsabilité de la dégradation des moyens que la société aurait pu se donner pour parer à une telle éventualité – prévisible depuis des années – parce que ses décisions butent systématiquement sur le « mur de l’argent ». La crise sanitaire est liée à l’organisation capitaliste de la société et en particulier de la santé publique. (...)

Que faire et que dire ?

Une telle crise sanitaire appelle, me semble-t-il, à la fois des mesures de pouvoir et une prise en charge démocratique. Le gouvernement des capitalistes, les destructeurs du service public, les technocrates et les adeptes des mesures liberticides doivent se voir opposer une autre logique. Celle du mouvement social et de la gauche qui ont construit la Sécurité sociale, l’hôpital public et la recherche publique que les gouvernements successifs n’ont eu de cesse de freiner, de détourner, de démanteler ; sans oublier les alternatives qui ont été produites et expérimentées par ce même mouvement social.

Il est donc nécessaire de dire des choses concrètes qui répondent à la fois aux problèmes réels et à l’inquiétude et qui soient aussi porteuses d’alternatives. C’est précisément dans des moments comme celui que nous vivons actuellement que le mouvement social et les forces avec lesquelles il peut s’allier doivent réaffirmer leur capacité et leur disponibilité à « gérer » une telle crise autrement et mieux que le pouvoir.

Après les Gilets jaunes et le mouvement sur les retraites, la pandémie a ouvert un nouveau front de crise politique. (...)
C’est donc le moment de sortir notre arsenal programmatique et de demander, par exemple, la réquisition des entreprises de santé, le contrôle sur les stocks et la distribution des masques 7, la mise en place d’un office public du médicament, et bien entendu le rétablissement des postes de travail supprimés dans l’hôpital public 8, etc. C’est aussi le moment de mettre avant des mesures d’accompagnement liées aux mesures de confinement et de prévention :

  • Prise en charge systématique des salarié·es contaminé·es en accident de travail ;
  • Indemnisation à 100% en cas de chômage partiel ;
  • Prise en charge à 100% des arrêts de travail pour la garde des enfants 9 ;
  • Droit de retrait permettant la réorganisation des activités et l’obtention des moyens de précaution (au Musée du Louvre, notamment, l’action « de retrait » a permis que des congés soient accordés aux salariés et que du matériel de protection soit fourni) ;
  • Organisation par les intéressé·es (CHSCT/CSE, délégué·es du personnel, etc.) sur les lieux de travail des mesures barrières à prendre ;
  • Contrôle par les instances représentatives du personnel, les intersyndicales, etc. du respect des dispositions du Code du travail qui « impose à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la protection de la santé de son personnel ».
  • Communication indépendante par les instances représentatives du personnel sur les mesures prises, sur la situation épidémique, sur les décisions patronales et gouvernementales (par exemple, le syndicat SUD-Solidaires du nettoyage de Toulouse, encore lui, a publié à destination des équipes syndicales et des élu·es une « Note » intitulée « Épidémie, entreprise et actions syndicales ». Sur 4 pages, il est rappelé le « risque », les « mesures de protection individuelles », les « mesures de protection collectives », les dispositions en matière d’arrêt de travail et leurs limites, le « droit de retrait ». Le document rappelle également le rôle des élu·es du CSE-CHSCT, les modalités du déclenchement du « droit d’alerte », le rôle du CSE dans la « planification des congés », et les actions possibles en matière de prises de mesures collectives. Sans oublier, bien entendu, la défense du droit de circulation syndicale sur les chantiers) ;
  • Sans oublier de poser la question du sort des salarié·es et des entreprises qui vont mettre la clé sous la porte à l’issue de l’épidémie.
  • Il y a, c’est évident, beaucoup d’autres mesures à mettre en œuvre et à revendiquer. Ce n’est pas le lieu de les détailler ici et d’autres le feront plus adéquatement.
  • La question qui nous est posée est donc la suivante : « Devons-nous – pour paraphraser une citation –, nous adapter passivement à la fortune des décisions des États » ?
  • La réponse devrait être « Non, bien sûr ». Nous devrions donc agir en marchant sur deux pieds :
  • Répondre au mieux à la crise sanitaire en mobilisant les savoir-faire et les capacités d’initiatives ;
  • Transformer la crise sanitaire, sociale, économique, politique et institutionnelle en faisant la démonstration que la santé publique est une question trop importante pour être laissée aux mains des néolibéraux. (...)