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Curée médiatique contre le référendum « irresponsable » d’Alexis Tsipras
Article mis en ligne le 1er juillet 2015

(...) Consulter le peuple grec sur les réformes « indispensables » qui lui sont imposées ? « Irresponsable » répond en chœur la fine fleur de l’éditocratie française, dont les tweets rageurs préfiguraient les points de vue… tout en nuances.

En 2011 déjà, l’annonce d’un référendum, finalement abandonné, sur le « plan de sauvetage » européen avait provoqué une levée de boucliers médiatique. De cette fronde contre le « dangereux coup de poker grec », Le Monde prenait déjà la tête : « Ce n’est pas ainsi que l’Europe doit fonctionner » assurait le quotidien, qui anticipait non sans cynisme un résultat défavorable : « Imagine-t-on d’ailleurs un peuple acceptant, unanime, une purge aussi violente que celle proposée ? [1] Ce lundi, deux jours après l’annonce d’Alexis Tsipras, l’éditocratie française a remis le couvert.

Le Monde sonne la charge

Ainsi, selon l’éditorial du Monde, la tenue d’un référendum serait un « piètre chantage », voire un aveu de « faiblesse politique » de la part d’Alexis Tsipras qui refuserait « d’endosser l’échec des négociations ». Un échec dont les « Européens », c’est-à-dire les dirigeants européens, ne seraient en aucun cas responsables. Stricts mais bienveillants, ceux-ci seraient, à l’instar d’Angela Merkel, conscients de leur « responsabilité historique ». Et même prêts à se montrer souples si le mauvais élève grec acceptait de « moderniser l’État » et « collecter l’impôt ». Peu importe si l’intransigeance des créanciers portait davantage sur les mesures d’austérité, telle que la diminution des pensions. C’est Tsipras qui doit « faire preuve, enfin, de responsabilité »… c’est-à-dire à suivre les instructions des éditorialistes du Monde et « changer de posture ». De toute évidence, l’éditorialiste anonyme du Monde, à l’image de nombre de ses confrères, a choisi d’ignorer le point de vue grec sur le déroulé des événements, et notamment le récit du ministre de l’Économie Yanis Varoufakis, pourtant publié sur divers sites.

Une nouveauté : pour les lecteurs qui souhaiteraient s’épargner la lecture de l’éditorial du Monde, une version sous forme de dessin pour les enfants est disponible en « Une » : (...)

Commentaires à l’emporte-pièce depuis le fauteuil confortable d’une rédaction parisienne, informations bancales et autres partis pris droitiers sont le lot commun des éditocrates. Mais en la matière, les éditorialistes du Monde et de Libération ne font pas le poids face à Jean-Marie Colombani. Dans une tribune publiée dans Slate, il dénonce « l’imposture Tsipras » ainsi que Syriza, un parti « anti-européen », « national-populiste », qui aurait « conduit le pays dans l’impasse ». Il est vrai que la situation du pays était excellente avant les élections de janvier 2015.

Le mot « référendum » évoque-t-il de mauvais souvenir à Jean-Marie Colombani ? Furieux, il dénonce la consultation des Grecs qui serait en fait… « une prise en otage » des Grecs. Les dirigeants européens, quant à eux, « ne peuvent pas abandonner les Grecs à leur triste gouvernement ». Après Arnaud Leparmentier, c’est au tour de Jean-Marie Colombani de signer un nouvel appel à renverser le gouvernement grec. Les Grecs ont voté et soutiennent Syriza ; mais, c’est bien connu, les éditocrates savent mieux que le peuple ce qui est bon pour lui. Et Colombani de le prouver dans une conclusion pleine de lucidité : « Les Grecs méritent mieux que Tsipras et ses alliés. Comme ils n’avaient pas hier mérité les colonels. »

Un article publié sur le site de Marianne revient sur les réactions de la presse à l’annonce du référendum. On retrouve une apologie – prévisible – des « réformes » dans Le Figaro : (...)

cette « revue de presse » n’est pas seulement une accumulation de prises de position fort éloignées du devoir d’informer, voire même outrancières : elle dessine une cohérence dans les partis pris de l’éditocratie française, qui de nouveau se range du côté des institutions européennes (rebaptisées une fois de plus « l’Europe » ou « les Européens ») et joue le rôle de chien de garde de l’eurocratie contre les empêcheurs d’austériser en rond. Voilà qui n’est pas sans rappeler le traitement médiatique d’un certain référendum organisé en 2005, duquel aucune leçon ne semble avoir été tirée.

Dès lors, doit-on conclure que « la presse » est contre la Grèce ? Ce serait tentant, mais inexact : tout d’abord ce serait oublier la presse alternative, et toute une partie de la presse qui n’a pas participé à la curée contre le gouvernement grec, voire qui l’a dénoncée. Et même au sein de la presse dominante, des voix discordantes existent (...)