
À l’ère d’Apollo et celle d’Artemis, les courses à la Lune ne sont évidemment pas dictées par les mêmes enjeux idéologiques et de suprématie du début des années 1960 quand les Soviétiques triomphaient dans la conquête spatiale en réalisant de nombreuses « premières ». Les explications d’Isabelle Sourbès-Verger, géographe spécialiste des politiques spatiales et directrice de recherche au CNRS (Centre Alexandre Koyré).
C’est dans un contexte géopolitique de guerre froide que le 25 mai 1961 le président Kennedy lance la course à la Lune devant le Congrès des États-Unis. Comme nous l’explique Isabelle Sourbès-Verger, géographe spécialiste des politiques spatiales et directrice de recherche au CNRS (Centre Alexandre Koyré), les enjeux du « programme Apollo étaient de rétablir définitivement la supériorité des États-Unis comme puissance spatiale capable de faire des choses que personne ne savait faire ». (...)
De façon à démontrer leur supériorité technologique sur l’Union soviétique, « plusieurs projets d’ampleur sont proposés à Kennedy, dont celui de la marche sur la Lune, qui sera retenu comme étant le plus symbolique ».
Kennedy, qui n’est pas lui-même un passionné de l’exploration spatiale, prend donc la « décision d’envoyer des Hommes sur la Lune avant la fin de la décennie soixante » et d’y aller très vite afin d’éviter « que les Soviétiques y parviennent avant eux ». (...)
En parallèle, Kennedy demande et obtient des financements pour le développement de satellites de télécommunications, nécessaires pour diffuser dans le monde les images des missions Apollo.
Des succès soviétiques
Les Soviétiques ne vont évidemment pas rester les bras croisés et ont aussi l’objectif d’envoyer des Humains sur la Lune. Mais, « plusieurs évènements vont jouer contre eux ». La première chose, c’est « qu’ils n’ont pas le budget et ils ne choisissent pas d’en faire un programme prioritaire », à la différence des États-Unis dont le pays entier va contribuer à cet effort spatial inédit. (...)
De Kennedy à Trump, le même credo de la supériorité
Aujourd’hui, les États-Unis relancent une course à la Lune dans un contexte très différent de l’époque du programme Apollo. Une « pseudo course » tient à souligner Isabelle Sourbès-Verger, plutôt surprise. Dans la mesure où les Chinois ont bien « des visées lunaires mais encore limitées » et se sont dotés d’un programme d’exploration robotique solide et pragmatique, loin des ressources financières américaines, il est plutôt surprenant de voir des hommes politiques américains « comparer les capacités chinoises à celle des Américains », ce qui en soi « pose problème ». En effet, la Chine est encore dans une « phase de rattrapage et de maîtrise technologique », et elle ne peut que « se féliciter de voir qu’elle est créditée de faire jeu égal avec les États-Unis ». Quant à savoir si les Chinois enverront des taïkonautes sur la Lune, « cela n’a pas été approuvé et dépendra des priorités du pouvoir politique chinois » qui doit y trouver un intérêt très significatif compte tenu du financement nécessaire. Une « option que les projets américains pourraient renforcer en suscitant un gain de fierté nationale et d’image de puissance internationale ». (...)
Avec leur programme Artemis, les Américains sont repartis à destination de la Lune avec l’idée que « cela puisse servir pour Mars et réfléchissent à comment y rester durablement ». Quant à l’Europe, le Japon et la Russie, « tous souhaitent coopérer au sein de programmes internationaux », à la différence de la Chine et de l’Inde qui souhaitent « acquérir les compétences qui leur manquent pour voyager, vivre et travailler sur la Lune et avoir un rang significatif dans d’éventuelles coopérations ultérieures ».