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Reporterre
EDF saborde un champion français de l’énergie solaire
Article mis en ligne le 11 mai 2015

Nexcis est une filiale d’EDF travaillant au développement de panneaux photovoltaïques, en pointe sur son secteur et promise à un bel avenir. EDF a pourtant décidé soudainement de ne plus la financer. Si ce pionnier français du solaire ne trouve pas de repreneur, ses portes fermeront le 31 juillet.

L’annonce parait sans appel, EDF ne financera plus Nexcis, sa filiale de recherche et développement en photovoltaïque. La décision a abasourdi les salariés et les professionnels du secteur. (...)

« Il y a un grand paradoxe. La semaine de l’adoption de la loi sur la transition énergétique au Sénat, notre directeur général nous apprenait la cessation d’activité », dit Stéphan Dainotti, délégué CGT du personnel. Nexcis est implanté depuis 2009 sur la zone industrielle de Rousset, à une vingtaine de kilomètres d’Aix-en-Provence. Fondée par Olivier Kerrec, ancien d’EDF, elle est détenue principalement par EDF et par EREN, une société de Pâris Moratouglou, lui-même fondateur de la société EDF Energies Nouvelles, qui est également au capital de Nexcis.

77 salariés sont employés par celle-ci et plusieurs dizaines d’emplois indirects sont induits par son activité. Pour développer ses recherches, Nexcis a reçu 35 millions d’euros du groupe EDF et 25 millions d’aides publiques sous forme de crédits d’impôts et d’aides des collectivités, auxquels s’ajoutent 15 millions d’aides européennes. Forte de ces investissements, l’entreprise travaille au développement de panneaux photovoltaïques à coût réduit en couches minces à destination des centrales solaires ainsi que sur le photovoltaïque intégré à l’habitat, dit BIPV (Building integrated photovoltaics). Elle est en pointe sur son secteur. (...)

Couplé à des panneaux solaires sur le toit, la technologie permet de rendre un bâtiment auto-suffisant en électricité pour des activités diurnes. Le procédé présente un rendement de transformation de l’énergie solaire de l’ordre de 14 %, dans la moyenne de performance des meilleurs fabricants mondiaux. Nexcis s’apprêtait à franchir le cap de la production industrielle du BIPV pour intégrer un marché mondial estimé à 35 milliards de dollars à l’horizon 2019.
Retournement de discours

Mais à la surprise générale, le 19 février dernier, les représentants du personnel ont appris de leur direction la mise en place d’un PSE (Plan de sauvegarde de l’emploi). Le 2 mars, l’ensemble du personnel en était informé. Depuis, les salariés sont payés et continuent à se rendre sur leur lieu de travail mais stoppent leurs recherches. La décision leur est incompréhensible. Le BIPV qu’ils développent a été nominé en décembre 2014 au concours EDF Pulse qui distingue une trentaine d’innovations.

Un mois avant l’annonce du PSE, Nexcis était présente aux Emirats Arabes Unis pour défendre ses produits dans un salon international dédié aux nouvelles énergies. « En novembre se tenait ici même un séminaire où notre directeur général, Olivier Kerrec, parlait de BIPV comme d’un produit innovant, qui avait tout un marché à prendre. Pour lui, en janvier 2015, on poserait la première pierre de la ligne industrielle », raconte Stéphan Dainotti.

Du côté d’EDF le discours s’est retourné. (...)

. Jointe par Reporterre, l’entreprise publique n’a pas souhaité s’exprimer.
(...)

les salariés mobilisés doutent de la bonne volonté d’EDF et de leur direction. Ils témoignent d’un climat de défiance et d’une opacité dans les négociations en cours avec la direction. « Ils nous promettent des reclassements mais on n’a encore vu personne d’EDF », lance une salariée à l’assemblée. (...)

La plupart des salariés de Nexcis restent solidaires et travaillent à une solution de reprise. « On a dix personnes qui prennent des contacts dans ce sens », dit Yannick Besnard. Il affiche la motivation des salariés : « On veut continuer. On croit au produit ». Ils ne sont pas les seuls. De toute l’Europe, affluent des lettres de soutien de chercheurs du domaine. Treize chercheurs du CNRS et universitaires ont publié une tribune appelant à « sortir Nexcis de la vallée de la mort ».

Elle reconnaît à Nexcis, « la mise au point d’une technologie originale de fabrication de modules, au meilleur niveau international ». A l’unanimité, le Conseil Régional de PACA a adopté une motion de soutien à Nexcis le 24 avril. Les députés Jean-David Ciot (PS) et François-Michel Lambert (EELV) ainsi que les députés européens Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche) et Michèle Rivasi (EELV) se sont prononcés publiquement en faveur de Nexcis.