
Depuis octobre 2017, une insurrection islamiste armée – dont certaines actions ont commencé à être revendiquées par l’organisation État islamique en 2019 – sévit dans la province riche en ressources de Cabo Delgado, dans l’extrême nord du Mozambique. Ces derniers mois, une série d’opérations brutales et dévastatrices contre des chefs-lieux et des villages de la province ont poussé des milliers d’habitants à prendre la fuite. (...)
En trois ans, ces violences ont fait plus de 1 400 morts, selon l’ONG The Armed Conflict Location & Event Data Project (Acled), qui documente la situation dans le Cabo Delgado.
La dernière opération d’envergure, revendiquée par la Province d’Afrique centrale de l’État islamique (ISCAP), remonte au 27 juin. Ce jour-là, les insurgés ont pris d’assaut Mocimboa da Praia, ville portuaire de 30 000 habitants qui constitue un centre "logistique crucial pour l’activité économique et l’aide humanitaire [dans le nord de la province]", précise Acled. Au moins 40 civils et 8 ouvriers d’une entreprise sud-africaine travaillant pour le groupe français Total sur un projet gazier ont été tués. Des témoins ont assuré dans la presse que les assaillants, restés trois jours sur place, ont décapité des civils associés au gouvernement, comme des instituteurs et des membres du Frelimo, le parti au pouvoir. (...)
En trois ans, ces violences ont fait plus de 1 400 morts, selon l’ONG The Armed Conflict Location & Event Data Project (Acled), qui documente la situation dans le Cabo Delgado.
La dernière opération d’envergure, revendiquée par la Province d’Afrique centrale de l’État islamique (ISCAP), remonte au 27 juin. Ce jour-là, les insurgés ont pris d’assaut Mocimboa da Praia, ville portuaire de 30 000 habitants qui constitue un centre "logistique crucial pour l’activité économique et l’aide humanitaire [dans le nord de la province]", précise Acled. Au moins 40 civils et 8 ouvriers d’une entreprise sud-africaine travaillant pour le groupe français Total sur un projet gazier ont été tués. Des témoins ont assuré dans la presse que les assaillants, restés trois jours sur place, ont décapité des civils associés au gouvernement, comme des instituteurs et des membres du Frelimo, le parti au pouvoir.
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Cette attaque, la troisième contre Mocimboa da Praia depuis 2017, s’inscrit dans une série d’offensives similaires visant des chefs-lieux du Cabo Delgado ces derniers mois.
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La ville de Pemba, capitale du Cabo Delgado, abrite aujourd’hui une grande partie des déplacés. Si certains sont arrivés peu après la dernière attaque de Mocimboa da Praia, d’autres sont là depuis plusieurs mois, comme Miguel Momade, un agriculteur qui a fui Quissanga avec ses proches :
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Nous avons marché près de 60 kilomètres, dont trois jours à travers la forêt, jusqu’à trouver un camion qui nous a menés à Pemba. Je savais que je pouvais trouver un endroit sûr à Pemba car ma sœur vit ici. J’ai amené 20 personnes avec moi, dont plusieurs enfants.
La maison n’est pas grande et il n’y pas assez de nourriture : les enfants se réveillent en pleurant parce qu’ils n’ont pas mangé. À Quissanga, j’avais un travail pour nourrir ma famille. Ici, je n’ai plus rien. J’aimerais y retourner, mais seulement quand le gouvernement du district sera de retour. (...)
Emídio Beúla est journaliste et chercheur pour le Centre pour la démocratie et le développement (CDD), une organisation de la société civile. Il souligne que l’augmentation du nombre de déplacés rend très complexe leur suivi (...)
Beaucoup de déplacés échappent au contrôle du gouvernement. Certains, on ne sait pas combien, survivent dans la nature sans rien : sans toit, sans eau, sans nourriture. Ce sont des personnes trop âgées ou qui n’ont pas les moyens financiers de se déplacer. De même, quand Mocimboa da Praia a été attaquée, des habitants ont pris des bateaux surchargés pour faire des dizaines de kilomètres en mer jusqu’à Pemba et nous ne savons pas s’ils sont tous bien arrivés à destination. Les informations sont difficiles à obtenir et les journalistes ont peu accès aux zones attaquées. (...)
Que sait-on de l’insurrection ?
Selon le chercheur Eric Morier-Genoud, professeur d’histoire africaine à la Queen’s university de Belfast, le groupe actif au nord du Mozambique s’est d’abord construit "sur une secte religieuse qui existe depuis 2007 au moins". "Le changement a eu lieu vers 2016 quand ils ont abandonné leur tentative de vivre hors de la société selon leurs règles et sont passés à un agenda de jihad, à savoir la tentative armée de changer l’État pour que la société dans son entier soit régie par la charia [la loi islamique]", explique Eric Morier-Genoud.
Le groupe commet ainsi sa première attaque d’envergure en octobre 2017 à Mocimboa da Praia.
Ils seraient actuellement entre 500 et 1 000 combattants, dont une majorité de Mozambicains. Si la secte a émergé avant le développement des projets gaziers et l’essor de la mine de rubis de Montepuez, Eric Morier-Genoud confirme que les "transformations économiques et sociales des années 2010 ont assurément créé des frustrations, notamment quant aux attentes des retombées de ces découvertes".
En mai 2018, une photo de combattants munis du drapeau de l’organisation État islamique avait circulé au Mozambique. Mais ce n’est qu’en juin 2019 que l’EI a communiqué pour la première fois sur une attaque dans la province.
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Le chercheur estime que le groupe a "gagné en puissance de manière régulière", passant initialement d’attaques de nuit, isolées, à l’occupation de chefs-lieux ces derniers mois : "D’après certaines informations, ils contrôlent même maintenant certaines zones où ils ont commencé à établir un semblant d’administration."
Dans ce contexte, le retour des déplacés dans leurs localités d’origines est difficile. Mais dans les campements et dans les familles d’accueil, la crise humanitaire s’accentue.