
Brigitte Luis Guillermo Baptiste dirige depuis 2011 le plus important institut de recherches biologiques d’Amérique latine. Mais l’experte reconnue et médiatique de la biodiversité en Colombie est également transgenre, ce qui ne laisse pas de surprendre dans ce pays conservateur.
Elle a un emploi du temps de ministre, pas une minute à elle et des weekends consacrés à sa famille, sa femme, Adrana, et ses deux filles de 15 et 17 ans. Pour rencontrer Brigitte Baptiste, 55 ans, il faut s’y prendre longtemps à l’avance, envoyer des courriels à son assistante ou saisir l’occasion de sa venue à un événement comme la conférence annuelle de l’association pour la cause animale Los Defenzoores, l’équivalent colombien de 30 Millions d’amis en France. Fin octobre à Medellín, elle y recevait le prix de défenseur des animaux de l’année 2018, une reconnaissance pour son combat pour la biodiversité, voire la diversité colombienne sous toutes ses formes. Car Brigitte Baptiste est un symbole non seulement pour les écologistes mais aussi pour la communauté LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres). Les deux combats de sa vie sont la biodiversité et l’identité trans « et les deux sont finalement complètement liées », souligne-t-elle. (...)
La biologiste, reconnue par ses pairs, a plus l’apparence d’une punk que d’une scientifique et ne passe jamais inaperçue. Cheveux rose ou bleu en fonction de ses humeurs, maquillage prononcé et talons aiguilles (...)
Tous les jours, elle porte des jupes ou des robes après 35 années de sa vie en pantalon ! Elle aime qu’on la regarde, que les gens se demandent quelle mouche l’a piquée dans son laboratoire pour qu’elle choisisse un jour de devenir femme. « Je n’aime pas les étiquettes, encore moins identitaires, on vit dans un monde ambigu et ça me parait génial, car l’ambiguïté appelle le génie et la créativité », sourit-elle.
« Être transgenre est un équilibre entre le féminin et le masculin sans devoir assumer un genre en particulier, c’est être libre »
Quand elle évoque sa carrière, elle parle modestement « d’un parcours tout ce qu’il y a de plus normal ». (...)
un CV à faire rougir d’envie les scientifiques les plus chevronnés. Elle a choisi le prénom Brigitte en hommage à notre Bardot nationale il y a 20 ans, quand, à l’âge de 35 ans, elle a décidé d’accepter que le corps dans lequel elle était n’était pas celui qu’elle voulait. Au même moment, elle a rencontré sa femme, Adrana, qui comprend parfaitement son envie d’être elle-même et la soutient depuis lors. Le 4 juin 2015, le gouvernement colombien a autorisé, par décret, le changement de sexe et de nom pour les personnes transgenres sur les papiers d’identité, sans la nécessité de passer par une évaluation physique ou psychologique. Brigitte Baptiste a été l’une des premières à réaliser ce rêve et a changé son état civil. (...)
Fort de son statut de directrice de l’Institut von Humboldt, la scientifique est chroniqueuse dans le journal La Republica et intervient régulièrement dans les médias. Son franc-parler et son style séduisent, elle est devenue la porte-parole des écologistes dans les sphères du pouvoir. Brigitte Baptiste est une optimiste et défend sa biodiversité partout, tout le temps. « L’appropriation des terres par de grandes entreprises, l’expansion de l’agriculture, la destruction des écosystèmes, on a l’impression que la situation environnementale en Colombie empire mais d’un autre côté, nous signons des accords internationaux et je vois une mobilisation citoyenne de plus en plus importante », souligne-t-elle.
« Je pense que mon genre n’a jamais été important dans ma carrière » (...)
Malgré les avancées des droits LGBT ces dernières années en Colombie (changement d’état civil facilité en 2015, mariage pour tous en 2016), le pays reste conservateur et patriarcal. L’Église catholique et les évangélistes ont un poids important dans la société. L’avortement est toujours illégal. (...)
Malgré les avancées des droits LGBT ces dernières années en Colombie (changement d’état civil facilité en 2015, mariage pour tous en 2016), le pays reste conservateur et patriarcal. L’Église catholique et les évangélistes ont un poids important dans la société. L’avortement est toujours illégal.