
Le forage du premier « observatoire de magma » au monde doit débuter en 2024.
Dans Voyage au centre le Terre, publié par Jules Verne en 1894, une équipe de scientifiques pénètre dans les entrailles de notre planète via le cratère du volcan islandais Snæfellsjökull.
C’est aujourd’hui un autre volcan, situé à quelques centaines de kilomètres, qui va devenir le théâtre du premier « observatoire de magma » au monde. Les scientifiques pourront y observer des roches en fusion jusqu’à 1.300°C grâce à un tunnel de deux kilomètres de profondeur creusé dans la paroi du volcan.
Sauf qu’à la différence du volcan choisi par Jules Verne pour son récit, le Krafla est lui bien actif, et recrache encore des panaches de fumée et des bouillonnements sulfureux au travers de sa caldeira remplie d’une magnifique eau turquoise.
Tout a commencé en 2009, lorsque des géologues creusaient la région pour étudier la possibilité d’exploiter de nouveaux champs géothermiques. En forant un nouveau puits, les ingénieurs sont tombés accidentellement sur une poche de magma de 500 millions de mètre cubes à 2,1 kilomètres de profondeur.
Une surprise pour les volcanologues, qui pensaient devoir descendre à plus du double avant de tomber sur le magma du Krafla. Mais ces derniers y ont vu l’occasion d’y bâtir un projet scientifique inédit. (...)
Le projet, nommé « Krafla Magma Testbed », a été lancé en 2014 et intègre des scientifiques issus de 11 pays et de 38 instituts et entreprises.
Doté d’un financement de 90 millions d’euros, il doit permettre non seulement de mieux comprendre la dynamique des volcans et donc de prévoir leurs éruptions, mais aussi de développer une nouvelle source d’énergie naturelle. Le magma produit en effet d’énormes quantités de vapeur à 450°C, ce qui pourrait créer cinq à dix fois plus d’énergie qu’une centrale géothermique normale.
Certains s’inquiètent pourtant des conséquences de ce « tunnel de la mort », affirmant que les forages risquent de déclencher accidentellement une éruption volcanique.
En 2006, un forage pétrolier a ainsi provoqué des fissures dans le sous-sol de Sidoarjo, une ville de l’île indonésienne de Java, aboutissant à une éruption et un flot interrompu de boue qui dure depuis 15 ans. Selon les chercheurs, le forage avait alors perforé une gigantesque poche d’eau sous pression déjà fragilisée par un tremblement de terre.
Mais l’un des fondateurs du projet islandais, John Eichelberger, balaye ces inquiétudes d’un revers de main. « C’est comme piquer un éléphant avec un petite aiguille », affirme-t-il. (...)