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En Ukraine, feu Blackwater fait reparler de ses « mercenaires »
Article mis en ligne le 12 mai 2014

Blackwater, la société militaire privée américaine connue pour ses bavures pendant la guerre en Irak, fait-elle son retour dans les affaires internationales ?

Le journal allemand Bild am Sonntag affirme ce dimanche que parmi les gros bras ukrainiens qui combattent les miliciens pro-russes se cachent 400 mercenaires d’Academi, le nouveau nom de Blackwater. Ils mèneraient des opérations de guérilla contre des rebelles pro-russes, autour de la ville de Slaviansk (Est).

Le journal s’appuie sur des communications radio entre des centres de commandement de l’armée russe, interceptées par la NSA et transmises à un service de renseignement allemand (le BND, équivalent de la DGSE). Si ces informations se confirment, tout un pan de l’histoire récente américaine sont sur le point de ressurgir.
« La compagnie des années Bush »

Cyril Magnon-Pujo, doctorant qui prépare une thèse sur les activités internationales de sécurité privée, rappelle que Blackwater est « la compagnie des années Bush ».

Créée en 1997 par l’ancien Navy Seal Erik Prince, la firme a pris de l’ampleur après 2001 en travaillant en étroite collaboration avec l’administration américaine. Pour le chercheur, Blackwater « a rompu avec les codes du milieu qui s’est mis en place dans les années 1990-2000 ».

A l’époque, les SMP cherchent à se construire une image « low-profile », appellent de leurs vœux une régulation et revendique des « codes de conduite », aux antipodes du « stigmate mercenaire des années 70 » :

« D’une part le mercenaire est sans foi ni loi, d’autre part c’est celui qui fait des coups d’Etat et renverse des gouvernements légitimes au nom des intérêts de l’Occident. Les chiens de l’impérialisme, aux yeux des Etats du Sud. »

A contrario de cette tendance, Blackwater « affirme son côté “viril”, assume d’être le bras armé de la puissance américaine, et catalyse les critiques ».

« Les concurrents ont sauté sur l’occasion pour en faire le méchant de l’industrie. C’est la seule compagnie dont le nom ressort régulièrement, pourtant ce n’est pas la plus grosse. »

Deux changements de nom en cinq ans (...)

L’entreprise s’appelle désormais Academi. Erik Prince s’en est allé. Academi, explique Cyril Magnon-Pujo, « a voulu prendre le contrepied de Blackwater » en termes d’image.

« Ils ont enlevé toutes les images d’armes sur leur site et mis en place un code de conduite interne. Cela ne doit pas leur faire plaisir que leur nom ressorte sur l’Ukraine. »

Depuis le mois de mars, des rumeurs persistantes évoquent la présence de Blackwater dans le pays. Des vidéos reprises entre autres par le Daily Mail montrent des hommes armés à qui la foule crie « Blackwater ! » et « Mercenaires ! ». (...)

« Ce que font concrètement ces compagnies est souvent invérifiable. Même si les universitaires se doutent qu’elles réalisent des missions pour des services secrets, c’est très difficile à prouver. »

En tout cas, que la propagande russe s’appuie sur une réalité ou surfe sur la rumeur, elle bénéficie de la réputation sulfureuse de feu Blackwater. Cyril Magnon-Pujo estime que « les Russes vont s’en servir », en renouant avec la rhétorique anti-impérialiste pour pointer du doigt les mercenaires (...)