
Dans le livre « Les besoins artificiels. Comment sortir du consumérisme », Razmig Keucheyan rappelle l’importance de la consommation inutile dans le désastre écologique. Et promeut le ralentissement des nouveautés, pour éteindre la soif de la distinction. Lecture.
« Le capitalisme sait tout marchandiser. » Le constat fait par Razmig Keucheyan, professeur de sociologie à l’université de Bordeaux, n’est certes pas nouveau. De Marx à André Gorz en passant par quelques autres grands noms de la sociologue (on pense à Bourdieu), nombreux sont les penseurs à avoir mis l’accent sur la formidable capacité du capitalisme à tirer profit, au sens propre, de ce qui constitue les besoins vitaux de l’Homme.
Mais il va au-delà. Dès lors que, selon le mot de la philosophe Agnes Heller, ces besoins « radicaux » (se nourrir, se vêtir, s’alimenter…) sont assouvis, le capitalisme se renouvelle et s’ingénie à en créer de nouveaux qui, peu à peu, s’infiltrent au cœur de nos existences qu’ils envahissent et colonisent, tel un cancer. La norme du « toujours plus » prend la place du « suffisant ». Les exemples abondent de cette emprise. Le culte de la performance individuelle en est un à travers le coaching et la vogue actuelle du nutritionnisme. Mais l’illustration la plus caricaturale et la plus immédiate est l’avalanche d’objets numériques (smartphones, montres et autres enceintes connectées) dont nous sommes sommés de nous équiper sous peine de passer pour des ringards.
Reprenant les travaux d’autres chercheurs, l’auteur évoque d’autres cas de ce « toujours plus », moins immédiats mais tout aussi pervers. Ainsi de la pollution lumineuse. (...)