La libéralisation des mouvements de capitaux constitue une arme fabuleuse contre le contrat social. Elle peut être très efficacement utilisée pour saper tout effort de la puissance publique visant à promouvoir des mesures progressistes. Par exemple, si un pays cherche à stimuler son économie ou à accroître ses dépenses de santé, cet écart de conduite peut être immédiatement puni par une fuite des capitaux.
Cette mobilité de la finance a fait naître ce que certains économistes ont appelé un « Sénat virtuel » de dirigeants qui, simplement en transférant des fonds, se trouvent en mesure de décider des politiques sociales et économiques. (...)
La taxe Tobin est à l’ordre du jour depuis près d’un quart de siècle, mais les grandes institutions financières ne veulent absolument pas en entendre parler. Et pour cause : elles profitent énormément de la situation actuelle, même si c’est au prix d’un ralentissement de l’économie réelle et de crises importantes. Les secteurs manufacturiers et industriels, pourtant bénéficiaires potentiels d’une telle mesure, s’y sont, eux aussi, généralement opposés. Sans doute ne leur déplaît-il pas que la libéralisation financière contrecarre les politiques sociales et exerce une forte pression sur le coût du travail. (...)
La dissimulation des solutions de rechange à la politique actuelle est d’autant plus nécessaire que l’opinion est souvent fermement opposée aux politiques de libre-échange et de libéralisation financière. (...)
Une idée avancée par les promoteurs de la libéralisation financière serait de demander au Fonds monétaire international (FMI) d’imposer, dans les faits, les règles contenues dans le projet d’AMI aux différents Etats qu’il « aide ». L’« avantage » d’une telle solution, c’est que le FMI fonctionne à l’abri des regards et ne rend de comptes à personne.