
Le Forum social mondial 2016 se tient du 9 au 14 août à Montréal, pour la première fois dans un pays industrialisé. L’occasion de débattre d’avenir et de stratégie.
Les forums sociaux mondiaux (FSM) occupent une place importante dans l’altermondialisme, mouvement historique d’émancipation qui prolonge et renouvelle les mouvements ouvrier et paysan, ainsi que la décolonisation.
Formé à la fin des années 1970, l’altermondialisme lutte contre la dette et les programmes d’ajustement structurel, qui sont une tentative de domination et même de recolonisation. Dans les années 1990, les mobilisations contre les sommets intergouvernementaux sont massives. Les FSM, opposés au Forum économique mondial de Davos, prennent le relais après les manifestations de Seattle, aux États-Unis, contre l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en 1999.
Le processus des forums est constamment orienté par la situation mondiale. (...)
La crise structurelle s’articule en cinq grands pôles : économique et social (inégalités et discriminations) ; écologique (mise en danger de la planète) ; géopolitique (guerres décentralisées, montée de nouvelles puissances) ; idéologique (interpellation de la démocratie, poussées xénophobes et racistes) ; politique (dont l’autonomie est abolie par la fusion avec la finance, alimentant la corruption). Après la disqualification des projets progressistes, à partir de 1989, la droite et l’extrême droite ont bataillé contre les droits et particulièrement contre l’égalité et la solidarité, pour les idéologies sécuritaires, déstabilisant le monde du travail par la précarisation généralisée ; contre l’État social par la marchandisation et la privatisation ainsi que la corruption généralisée des classes politiques. Et la sphère numérique a été subordonnée à la logique de la financiarisation.
Cette offensive a marqué des points mais ne s’est pas imposée. Les sociétés résistent et restent profondément contradictoires. La violence des courants réactionnaires et conservateurs est d’autant plus forte que ces derniers sentent que le vieux monde se meurt et que les sociétés leur échappent. Des révolutions sont en cours dans les domaines des droits (des femmes, des peuples), de l’écologie ou du numérique. Inachevées mais riches de promesses.
L’émergence de pensées radicales rompant avec les compromis de la gauche sociale-libérale retrouve droit de cité. Une nouvelle génération s’impose dans l’espace public via les mouvements constitutifs des FSM et se renouvelle à travers les mouvements d’occupation nés depuis 2011. Par ses exigences et son inventivité, celle-ci renouvelle la culture politique et les formes de radicalité. Le défi : la réinvention du politique ainsi que du rapport entre individuel et collectif. (...)