
En Australie, une étude s’est intéressée aux mécanismes de riposte graduée déployés dans différents pays. Elle conclut sur l’inefficacité du dispositif, expliquant que le lien causal entre la riposte graduée et la baisse du piratage n’est pas démontré. En France, le dispositif est appelé à évoluer et un nouvel arsenal anti-piratage est en préparation... preuve de cette impuissance ?
En France et dans d’autres pays du monde, la lutte contre le téléchargement illicite sur les réseaux P2P a abouti à la mise en place d’une nouvelle stratégie : la riposte graduée. Dans les grandes lignes, celle-ci consiste à envoyer des mises en garde de plus en plus fortes à l’internaute suspecté de piratage à chaque fois que son adresse IP est détectée en train d’échanger une œuvre protégée. (...)
Le dispositif est controversé. De multiples critiques lui sont adressées, à commencer par celle sur la responsabilité du fait d’autrui : n’ayant pas la possibilité de savoir exactement qui a téléchargé tel ou tel fichier, les concepteurs de la loi Hadopi ont élaboré un nouveau délit qui oblige le propriétaire d’un abonnement Internet à sécuriser son accès et assumer pour les autres lorsque ceux-ci piratent.
Sept pays appliquent la riposte graduée
Ces failles, mises en évidence lors des débats parlementaires, n’ont pas convaincu le législateur, le gouvernement et les ayants droit de renoncer. Active depuis 2010 dans l’Hexagone, la riposte graduée a depuis été exportée. On retrouve des mécanismes similaires, quoique adaptés à la situation locale, en Corée du Sud, en Irlande, en Nouvelle-Zélande, au Royaume-Uni, à Taïwan et aux USA. (...)
Mais le bilan de la riposte graduée est discuté. Outre le fait que le dispositif n’a abouti qu’à un seul abonné condamné, dont la peine de suspension de l’accès à Internet pour quinze jours ne sera pas appliquée, il n’est pas démontré sur le plan de l’offre légale que la Hadopi a poussé effectivement les internautes à revoir leur attitude et à se ruer sur les plateformes légales de contenus. (...)
Outre le prochain transfert au CSA des compétences de la Haute Autorité, l’actuelle présidente de la Commission de protection des droits (CPD) de l’Hadopi a été chargée de proposer d’ici janvier un nouvel arsenal législatif et contractuel qui permettrait de s’assurer de la mise hors service des sites de streaming et de téléchargement direct, avec la complicité forcée des intermédiaires techniques et financiers.
Or, ces réflexions révèlent dans le même temps l’impuissance de la Hadopi à peser sur le piratage en ligne. Même à supposer que les internautes délaissent effectivement les plateformes d’échange en P2P, ces derniers ne se dirigent pas tous vers l’offre légale. Pour une partie d’entre eux, la suite passe par un VPN, des trackers privés, du téléchargement direct ou de la diffusion en streaming.