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Mediapart
Homophobie : le gouvernement préfère la ministre Cayeux à « ces gens-là »
Article mis en ligne le 20 juillet 2022

Derrière les condamnations officielles des propos tenus par la ministre chargée des collectivités territoriales, il y a une réalité : celle d’un président et d’un gouvernement qui s’accommodent trop souvent de l’homophobie.

D’apparence, les propos de la ministre chargée des collectivités territoriales Caroline Cayeux font l’unanimité contre elle. Ils choquent au sein même du gouvernement. Des ministres condamnent et des élu·es de la majorité, plus habitué·es au silence ou à la langue de bois, prennent la plume pour faire pression dans une tribune. D’apparence seulement.

Depuis plus d’une semaine en effet, Caroline Cayeux est rappelée à ses prises de position passées. Elle, qui voyait dans le mariage pour tous ​​« un dessein contre la nature », a été jusqu’à assumer ces propos le 12 juillet dernier avec de nouvelles déclarations homophobes. « Je maintiens évidemment mes propos, mais j’ai toujours dit que la loi, si elle était votée, je l’appliquerais », a-t-elle déclaré, avant de lâcher l’argument censé la laver de tout soupçon d’homophobie : « J’ai beaucoup d’amis parmi tous ces gens-là. » (...)

Pour le pouvoir qui revendique volontiers son « progressisme », difficile de fermer les yeux. Les figures de la majorité y sont allées de leur condamnation. (...)

Pas un seul ministre capable de parler d’« homophobie »

Mais pas un seul membre du gouvernement n’a été capable de qualifier ces propos pour ce qu’ils sont. Pas un seul membre du gouvernement n’a été capable de prononcer le terme « homophobie ». Pas un seul membre du gouvernement n’a su expliquer toute la haine qui se cache derrière l’expression « ces gens-là ». Cette expression que la majorité des LGBTQI+ intègrent dès le plus jeune âge lorsqu’ils et elles comprennent qu’on la leur jettera à la figure toute leur vie. À l’école, lorsqu’ils et elles se feront harceler, ou à l’adolescence, lorsqu’ils et elles se feront agresser et/ou virer de chez leurs parents. Cette expression qui poussera tant de personnes à se cacher ou à se suicider. (...)

À ne pas nommer les choses, à résumer les propos de Caroline Cayeux à une simple « erreur », à croire qu’il suffit de présenter des « excuses » pour que l’affaire soit close, le gouvernement joue un jeu dangereux. Celui de la banalisation de propos discriminants et d’une homophobie de salon que l’on tolère trop souvent. Faut-il rappeler que l’homophobie n’est pas une opinion mais un délit, au même titre que le racisme, l’antisémitisme ou le sexisme ?

De toute façon, qui peut croire qu’Élisabeth Borne ou Emmanuel Macron ont découvert au détour d’une émission de Public Sénat en juillet 2022 les positions défendues depuis des années par Caroline Cayeux ? (...)

Que dire enfin du silence d’Emmanuel Macron ? Le président, capable de mettre en scène toutes ses colères, ne dit rien.

Peut-être sait-il que la ministre Cayeux cache toutes les autres nominations qui n’ont suscité aucune indignation. Celle de Gérald Darmanin, qui faisait l’éloge de la Manif pour tous et qui avait prévenu qu’il ne célébrerait « pas personnellement de mariages entre deux hommes ou deux femmes ». Celles de Sébastien Lecornu, Jacqueline Gourault ou encore Jean-Baptiste Lemoyne qui, eux aussi, ont milité contre les droits LGBTQI+. Celles de Damien Abad ou de Bruno Le Maire, tous les deux initialement opposés à la PMA.

Ou celle du nouveau ministre de la transition écologique, Christophe Béchu, qui est allé jusqu’à faire retirer une campagne de prévention contre le VIH après avoir maintes fois pris des positions homophobes. (...)

Peut-être le président sait-il que l’élément de langage lâché par tous les ministres depuis une semaine sur un supposé « gouvernement allié des LGBTQI+ » ne vaut rien quand on s’accommode encore et toujours de l’homophobie. Il ne sait aussi que trop bien que ces nominations répondent à son besoin, tactique, de glisser toujours davantage vers la droite pour se maintenir au pouvoir, et pour trouver des majorités. Alors tant pis si, au passage, on ferme les yeux sur des propos contraires en tout point aux promesses présidentielles. Emmanuel Macron n’est plus à ça près.