
Dix ans après la sortie du « Rapport Mapping » de l’ONU, inventaire des violations des droits humains commises entre 1993 et 2003, les victimes attendent toujours que justice soit faite.
Pour ce travail, réalisé par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies (HCDH), la majorité des 617 violences documentées peut être qualifiée de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Concernant les massacres visant les populations Hutu entre 1996 et 1997, le rapport indique que les attaques commises par l’Armée patriotique rwandaise (APR) et l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) « révèlent plusieurs éléments accablants qui, s’ils sont prouvés devant un tribunal compétent, pourraient être qualifiés de crimes de génocide ». Cette analyse a été vivement critiquée par le Rwanda lorsqu’il a reçu, pour commentaires, la première version du rapport en juin 2009. Jusqu’à aujourd’hui, cette partie du rapport continue à cristalliser les tensions entre anti-Front patriotique rwandais (FPR) et pro-FPR et tend à occulter le reste du contenu du rapport.
Alors que le « Rapport Mapping » aurait dû devenir un document fondateur de la lutte contre l’impunité en RDC, ses recommandations n’ont pas été suivies d’effet. (...)
De leur côté, les systèmes judiciaires des pays voisins ont systématiquement ignoré les exactions commises par leurs armées régulières sur le territoire congolais.
Action nationale d’envergure
Alors qu’une mobilisation du Conseil de sécurité des Nations unies aurait pu être salvatrice sur la question de la lutte contre l’impunité, ce dernier, faute de volonté politique des Etats membres, n’a apporté aucune réponse au manque de détermination de la RDC et des pays voisins de faire juger les responsables des crimes les plus graves commis entre 1993 et 2003. (...)
Avec la fin du long règne de près de vingt-cinq ans de la famille Kabila, durant lequel l’impunité est demeurée la règle en RDC, l’espoir d’engager le pays dans une nouvelle voie plus respectueuse des droits humains renaît au sein de l’opinion publique congolaise, avec l’arrivée tourmentée de Félix Tshisekedi à la présidence congolaise en janvier 2019. (...)
Il est aujourd’hui temps pour le président Tshisekedi, un homme politique qui n’est pas issu du monde des armes, d’un groupe armé et qui n’a aucun lien avec l’un d’eux, d’engager une action nationale d’envergure, en concertation avec la société civile, pour rompre avec l’impunité passée et engager le pays dans une paix durable basée sur la justice et le respect des droits humains. Cela ne pourra pas se faire sans le « Rapport Mapping » dont les recommandations doivent être mises en œuvre, particulièrement en ce qui concerne la mise en place de mécanismes de justice transitionnelle.