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Industrie de la mode : les effets (très) limités du recyclage des textiles
Article mis en ligne le 7 octobre 2020
dernière modification le 6 octobre 2020

Selon l’Agence de la transition écologique (Ademe), plus de 100 milliards de vêtements sont aujourd’hui vendus chaque année dans le monde et la production de l’industrie de la mode a doublé entre 2000 et 2014. Nous achetons aussi en moyenne 60 % de vêtements de plus qu’il y a 15 ans.

Cet emballement de la production et de la consommation est problématique à plusieurs niveaux, notamment pour les industriels qui doivent gérer des stocks de vêtements qui ne trouvent pas d’acheteurs, ainsi que pour les consommateurs et les consommatrices qui ont dans leurs armoires des quantités de vêtements les envahissant et dont ils ne savent plus que faire.

Trois solutions en « R » sont alors envisageables : réutiliser (en donnant une nouvelle utilité au vêtement par le don, l’échange, la revente), réparer et recycler. Le recyclage des textiles est de plus en plus mis en avant dans le débat public, notamment en France avec la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. La solution peut paraître séduisante car déculpabilisante. Or, la réalité n’est pas si simple. (...)

au vu de la surproduction de l’industrie de la mode et du fait des limites technologiques, le recyclage des textiles ne saurait donc être la solution aux problèmes de surproduction et de surconsommation de l’industrie de la mode.
Downcycling

Au delà de la surproduction, la première limite conduisant à ce constat est le downcycling, ou sous-cyclage. Selon l’éco-organisme agréé d’État Eco TLC, chaque année en France 2,6 milliards d’articles de mode sont mis en vente, et l’équivalent de 38 % de cette quantité est collecté. Sur les 239 000 tonnes collectées, 33,5 % sont transformés pour être recyclés, le reste est destiné à la réutilisation ou à l’élimination.

Le terme « recyclés » regroupe alors des réalités disparates : 10 % de ces textiles sont découpés pour faire des chiffons, les 23,4 % restants subissent un processus de recyclage afin d’entrer dans la composition d’une nouvelle matière. (...)

La technologie de recyclage dominante, le recyclage mécanique, permet très majoritairement de produire des fibres de longueur plus courte qui vont être de moins bonne qualité que les fibres vierges. En conséquence, les articles qui pourront être produits à l’aide du recyclage seront de moindre valeur que l’article initial, des vêtements deviendront par exemple des matériaux d’isolation ou des rembourrages de matelas.

Du fait de cette part majoritaire du downcycling, le textile recyclé ne représente aujourd’hui qu’environ 1 % du flux de matières textiles utilisées dans la production de vêtement.

Enfin, quand bien même une offre de vêtements en textile recyclé existe, la grande majorité des vêtements proposés n’est pas en 100 % textile recyclé car il est souvent nécessaire de combiner fibre recyclée et fibre vierge pour arriver aux standards qualitatifs du marché. (...)

Le tri est souvent présenté comme la première étape du recyclage mais il faut pour que le tri soit possible que les industriels de la mode aient fait le choix de matériaux recyclables et d’une confection qui permette le recyclage. Le recyclage est donc aussi une problématique qui incombe aux industriels.

Pour qu’un vêtement soit facilement recyclable, il est nécessaire de prendre en compte un certain nombre de paramètres, notamment le choix du fil. Un textile composé de fibres d’une seule matière (exemple : fil 100 % coton, fil 100 % polyester) sera plus facilement recyclable que des textiles composés de fibres multimatières, que certains auteurs vont jusqu’à qualifier de « mélanges monstrueux » tant ils rendent le recyclage plus complexe.

Aujourd’hui, les mélanges coton-polyester entrent dans la composition d’environ un tiers des vêtements produits et peu d’entreprises sont à même de les recycler. (...)

Ensuite, les choix de confection et d’embellissement peuvent aussi rendre le recyclage plus complexe ; les boutons, fermetures éclair et autres incrustations de strass devant être retirés pour que le textile soit recyclable.
Idéalisation du recyclage

Il faut en outre souligner que le recyclage reste un processus technologique que les consommateurs et les consommatrices peuvent avoir tendance à idéaliser.

En effet, le recyclage n’est pas neutre. Il s’agit d’un processus technologique qui consomme des ressources notamment énergétiques, qui peut aussi être polluant par le rejet d’émissions et le recours à des produits potentiellement dangereux pour la santé et néfastes pour l’environnement.

Ensuite les consommateurs et les consommatrices n’ont pas à l’esprit que seule une infime partie des acteurs de l’industrie peut prétendre au « recyclage en boucle fermée » et au « recyclage à l’infini », qui restent très difficilement atteignables au vu des volumes de l’industrie du textile et de la nature des articles produits. (...)

’il existe des solutions qui consomment très peu et ont un impact bien moindre. Il s’agit des autres « R » qui accompagnent le recyclage : réutiliser et réparer, auxquels on peut aussi ajouter refuser et réduire. (...)

Chercher en premier lieu à consommer les vêtements de manière plus modérée, privilégier la seconde main, échanger, donner, faire réparer, apprendre à réparer. Comme ont à cœur de le rappeler les activistes de Fashion Revolution, « le vêtement le plus durable est celui qui se trouve déjà dans votre garde-robe ».