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L’Argentine signe un accord dit « historique » avec le Club de Paris
Article mis en ligne le 13 juin 2014

« Accord historique avec les pays membres du Club de Paris » : le 29 mai 2014, ce titre a fait la une de la presse argentine, peut être même de la presse à travers le monde. Après plusieurs tentatives, le gouvernement Kirchner clôt les négociations avec le Club de Paris et accepte de rembourser 9,7 milliards de dollars au cours des 5 prochaines années. Si les investissements étrangers en provenance des pays créanciers s’avèrent insuffisants, le pays pourra prolonger le remboursement de deux ans. L’accord est ainsi conditionné à la réalisation d’investissements étrangers, postposés du fait du non paiement des prêts, dont une grande partie ont été concédés durant la dictature génocidaire (1976-1983), pour l’achat de matériel militaire notamment |1| . Les paiements s’échelonneront donc en fonction de l’afflux des investissements.

(...) Le Club de Paris est un groupe informel de 19 pays créanciers dont la fonction est de renégocier les modalités de paiements de dettes externes à leur égard. L’Argentine est en défaut de paiement à l’égard de 15 d’entre eux depuis fin 2001. L’Allemagne et le Japon concentrent à eux deux 60% des arriérés dus au Club de Paris (les entreprises Toyota et Siemens ont joué un rôle important durant des négociations). Les dettes à l’égard de la Hollande, de l’Italie et des États-Unis s’élèvent au plus à 8% de la dette totale pour chacun d’entre eux, suivies de dettes bilatérales qui portent sur des montants moindres.

L’Argentine effectuera un 1er versement de 650 millions de dollars en juillet 2014, suivi de deux paiements successifs de 500 millions en mai 2015 et mai 2016, soit 1,65 milliard de dollars sur deux ans. Des taux d’intérêts de 3 % seront appliqués au montant restant dû, à apurer d’ici 2019 ou 2021, et portés à 3,8 % si les échéances de paiements sont reportées. Ces taux d’intérêt sont présentés comme avantageux. Cependant, on ne questionne quasiment pas l’obligation d’allouer les ressources fiscales ou les réserves internationales au paiement de la dette, alors qu’elles pourraient être consacrées à d’autres fins. (...)

Le modèle de développement que l’on persiste à promouvoir, générateur d’inégalités, est mis à nu lorsque l’on analyse le rôle joué par les grandes entreprises des pays créanciers, qui font de bonnes affaires en Argentine et envisagent d’importants investissements au cours de la nouvelle période qui s’ouvre. Ces entreprises, opérant en marge de la sphère publique, ont cependant été les principaux acteurs des négociations et, d’après les commentaires, « elles ont agi dans leurs intérêts propres mais aussi poussées par le gouvernement national qui a tenu au cours des trois derniers mois des réunions avec les haut dirigeants de ces firmes afin qu’elles interviennent » (voir le quotidien argentin Página 12, 01/06/2014).

Les noms emblématiques et le domaine d’intervention de ces transnationales laissent entrevoir le modèle que l’on entend approfondir. (...)

Pourquoi, en tant que mouvements sociaux, nous ne pouvons pas nous réjouir de cet accord ?

Outre les intérêts des pays « créanciers » et de leurs multinationales que préserve un tel accord, nous dénonçons le montant de l’arriéré dû au Club de Paris porté à 9,7 milliards de dollars.

A plusieurs reprises, face à des accords imminents avec le Club (2008, 2010, 2011), plusieurs organisations et mouvements sociaux, dans l’exercice du droit d’accès à l’information, avons demandé des explications sur l’origine des dettes que le gouvernement argentin entendait payer au Club de Paris, à quoi avaient servi ces prêts, combien avait été payé au titre du service de la dette. Nous avons toujours considéré que le peuple argentin ne doit pas payer une dette pour laquelle il n’a pas été consulté, dont il n’a pas bénéficié et qui a été contractée sous la dictature. Nous rejetons l’argument selon lequel « les dettes ont été légitimées par les gouvernements démocratiques qui ont convenu de leur restructuration avec le gouvernement du pays exigeant le remboursement ». En effet, une dette illégitime ne perd pas, suite à un processus de renégociation ou de restructuration, son caractère illégitime. (...)