
Un collectif de treize personnalités du syndicalisme, du journalisme, du monde associatif et de la culture, parmi lesquelles Patrick Baudouin et Ariane Mnouchkine, expose le désarroi de ces femmes dont les demandes de visas n’aboutissent pas et réclame que l’Etat français tienne les promesses formulées à leur égard, lors de la chute de Kaboul.
Beaucoup de ces Afghanes, ciblées à double titre comme femme et comme journaliste, juge, avocate, défenseuse des droits humains et des droits des femmes, artiste ou intellectuelle, ont franchi la frontière d’un pays voisin, au Pakistan et en Iran surtout, où les plus chanceuses ont obtenu un visa local de séjour aujourd’hui expiré ou en voie de l’être. Dans l’impossibilité de travailler, donc de subvenir à leurs besoins, souvent seules, chargées de famille ou enceintes, elles subissent cet exil dans des conditions indignes, privées de tout, et sous la menace d’un renvoi en Afghanistan.
Des rendez-vous sans réponse
Beaucoup ont cru que la France, encore auréolée à l’étranger de son prestige de « pays des droits de l’homme », pourrait constituer une terre d’accueil. Et elles ont déposé une demande d’asile, pleinement justifiée par les risques encourus dans l’Afghanistan sous contrôle des talibans. Pourtant, rares sont les pays occidentaux à faire aussi peu que la France pour ces femmes. Les exemples de l’Allemagne, de l’Espagne, du Danemark, du Canada ou encore de l’Australie en attestent.
L’attitude de notre gouvernement face à ces appels au secours, auxquels le président Macron s’était engagé à répondre en août 2021, est plus que frileuse : elle est indigne. Les représentations consulaires, ou les officines qui en tiennent lieu, mettent des mois à accorder à ces réfugiées un rendez-vous en vue de pour constituer un dossier de visa. Ces organismes exigent l’achat d’un billet d’avion de retour − alors que celui-ci est exclu − ou la preuve de moyens de subsistance en France, ou l’engagement à les accueillir d’une famille, allant parfois jusqu’à assimiler − « par erreur » nous assure-t-on − ces demandes d’asile à de simples demandes de visa touristique (...)
Obstacles administratifs
La réunification familiale pour les Afghanes en attente de rejoindre leurs conjoints réfugiés en France souffre des mêmes aléas et lenteurs. (...)
Alors, au-delà de quelques dizaines de dénouements favorables obtenus en particulier grâce au soutien d’organisations et à la générosité de particuliers, l’accueil en France des Afghans, et surtout des Afghanes, reste très en deçà de ce que la situation exige.
C’est pourquoi, près de deux ans après la prise du pouvoir par les talibans dans le pays, nous, syndicats, organisations professionnelles, associations de solidarité internationale et des droits des femmes, demandons une nouvelle fois au gouvernement français qu’il mobilise ses représentants en France et dans les pays voisins de l’Afghanistan, qu’il en exige efficacité et diligence, en leur donnant les moyens et les consignes nécessaires, et qu’il agisse sans ambiguïté pour donner à ces réfugiées un accueil matériel et social digne de ce qu’elles sont en droit d’attendre de la France et des promesses de nos gouvernants.