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L ’église catholique et le mariage gay
Article mis en ligne le 18 novembre 2012

L’un des grands perdants des élections américaines du 6 novembre, on ne le soulignera jamais assez, a été l’épiscopat catholique américain. Après s’être engagé aussi ouvertement que possible en faveur du candidat républicain, dont le parti proposait l’un des programmes les plus réactionnaires des dernières décennies, il ne peut à présent que constater que ses fidèles, une fois de plus, ne l’ont pas suivi. L’élection a confirmé que les catholiques américains, dans leur grande majorité, sont politiquement progressistes. Mais l’épiscopat n’a pas perdu seulement au niveau fédéral : il a connu une défaite cuisante dans les quatre états qui, par suite de pressions dont il était en partie responsable, avaient mis au référendum la question de l’égalité de tous les couples devant le mariage civil (Maine, Maryland, Washington) ou de son interdiction par un amendement à la constitution (Minnesota).

Ayant pesé de tout son poids pour que cette question de droits humains, traditionnellement soumise à des décisions des représentants élus des états, soit retirée à ces derniers pour être soumise à la sanction populaire (comme si les progrès en matière de droits de l’homme devaient passer par un plébiscite), l’Église ne pourra désormais plus prétendre qu’à chaque fois que la question vient en référendum, le résultat est négatif. Les répercussions au niveau national risquent d’être considérables.

(...) L’église romaine et les droits humains ont rarement fait bon ménage, et il n’y a d’ailleurs aucune raison de s’en étonner. On n’en finirait pas d’énumérer les progrès accomplis dans la société civile, où que ce soit dans le monde, face à l’opposition du clergé et de la hiérarchie catholiques. L’église qui mène actuellement en France une campagne d’intimidation en vue de torpiller le projet d’ouverture au mariage à tous est la même qui y faisait interdire le divorce en 1816 et essayait d’empêcher son rétablissement en 1884, puis sa libéralisation en 1975 ; qui, en 1972, militait contre la loi Neuwirth sur la contraception et, en 1975, dans des termes de sinistre mémoire, contre la loi Veil autorisant l’interruption volontaire de grossesse. C’est l’église des Syllabus de Pie IX et de Pie X, papes dont l’actuel est, sous ce rapport, le digne successeur ; ces Syllabus qui rejetaient l’idée même de séparation de l’Église et de l’État et, plus précisément la primauté du mariage civil.

(...) pourquoi ces pressions sur le pouvoir civil ? Les questions théologiques relèvent de l’Église et ne relèvent que d’elle. Si cette dernière considère que le sacrement du mariage ne peut être administré qu’à deux personnes de sexe différent, c’est son affaire, et non celle de l’État. À l’inverse, que la société civile, par le biais de ses représentants élus, décide d’étendre le mariage civil à deux personnes du même sexe ne devrait pas concerner l’Église, qui a toute liberté de refuser de bénir des unions de ce type. S’il prend implicitement position contre la séparation de l’Église et de l’État, l’épiscopat serait-il prêt à accepter que le Parlement, au nom des progrès de la législation française en matière d’égalité des sexes, se saisisse de la question de l’ordination des femmes ? Ou du mariage des prêtres ? Et si c’était le cas, ne se produirait-il pas un tollé pour demander aux législateurs de se mêler de ce qui les regarde ? (...)

en s’engageant aussi fortement contre l’ouverture du mariage civil aux couples du même sexe, l’Église a beau être fidèle à sa tradition d’opposition à toute forme de libéralisation sociale, elle mène un combat d’arrière-garde qu’à long terme elle n’a aucune chance de gagner. Elle vient de connaître une sévère défaite aux États-Unis et une autre en Espagne, où le conseil constitutionnel vient de ratifier le mariage civil pour tous. (...)