
A propos d’Économie et biodiversité : produire et consommer dans les limites de la biosphère, de Marc Barra, Laurent Hutinet et Gilles Lecuir. Un plaidoyer bien documenté pour ne pas oublier l’esprit de la biodiversité quand on pense au climat ou aux énergies renouvelables
En quoi le présent ouvrage se distingue-t-il d’autres références, toutes utiles ? Avant tout par sa vision large et riche d’une transition écologique n’accordant pas une priorité absolue à la transition énergétique et aux enjeux climatiques, ou plus exactement capable de situer ces deux questions essentielles (énergie et climat) au sein de celles du « monde vivant » et de la biodiversité, en établissant des liens multiples que certains autres écrits sous-estiment.
Pourquoi l’entrée par la transition écologique dans toutes ses dimensions, à commencer par celle de la biodiversité et du monde vivant, éclaire-t-elle autrement de grandes questions d’avenir ?
En premier lieu, la problématique devenue familière de « l’érosion de la biodiversité » est ici fortement enrichie. Il ne s’agit pas seulement du rythme de disparition de nombre d’espèces, mais plus fondamentalement de la disparition d’interactions vitales et de leurs « fonctionnalités » au sein du monde vivant, dont le monde humain. Pour le dire autrement, la tendance fréquente à présenter la biosphère comme un « stock » ou un « patrimoine » naturel à préserver est réductrice. Si patrimoine il y a, il est vivant : c’est un potentiel dont il faut prendre soin en préservant ou entretenant des dynamiques et des fonctionnalités liées, ce qui va au-delà de l’injonction à un usage parcimonieux des « ressources » qui en forment les supports.
En second lieu, l’ouvrage rappelle que le vivant et l’inanimé sont intimement liés par des flux et cycles de matières, de gaz et de substances minérales ou organiques… Il faut donc dépasser, en l’englobant, l’intérêt légitime pour le climat, l’énergie ou les « ressources naturelles », (...)