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La couverture des attentats dans les journaux télévisés : compassion ou voyeurisme ?
Article mis en ligne le 19 novembre 2015

Dans la foulée des terribles attentats commis dans la soirée du vendredi 13 novembre 2015 à Paris et Saint Denis, les télévisions étaient au rendez-vous. À l’aide des réseaux sociaux, elles ont retracé le « film des évènements ». Pour le meilleur (rarement) et pour le pire (souvent).

L’autosatisfecit fut quasi général du côté des chaînes de télévision puisqu’elles n’avaient pas, cette fois, entravé le déroulement des interventions policières (notamment au Bataclan), ainsi que le souhaitait le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel en insistant sur « la nécessité de ne donner aucune indication susceptible de mettre en cause le bon déroulement des enquêtes en cours ». Comme le rapporta confraternellement Le Figaro [1], « les chaînes d’info ont retenu les leçons de Charlie ». (...)

les journaux télévisés de TF1 et France 2 – sans parler des « éditions spéciales » des chaînes d’information en continu – n’ont pas brillé par leurs nuances ni par leur retenue. Et force est de constater que la télévision française ressemble de plus en plus à celle des États-Unis où la mise en scène spectaculaire des images violentes (le sang, les fusillades, les poursuites) et des émotions (larmes des proches, angoisse des passants, recueillement) relèvent souvent du voyeurisme, mais surtout évincent toute analyse : le commentaire de l’action primant sur la réflexion. (...)

Soyons honnêtes, les grands médias ne sont pas les seuls responsables de ce voyeurisme-là qui est aussi le reflet d’une transformation de nos rapports à l’information et à l’intime. A l’heure où chaque individu devient potentiellement producteur d’information, les médias traditionnels sont concurrencés par les réseaux sociaux sur lesquels les événements circulent en temps réel. Résultat : les images diffusées sur BFMTV circulaient déjà depuis une heure sur Internet…

Mais surtout, ce voyeurisme médiatique ne serait pas possible sans l’exhibition numérique. Les frontières de la vie privée se dissipent lentement avec la complicité – volontaire ou pas – des citoyens eux-mêmes (...)

Les aspects les plus contestés des réseaux sociaux déteignent ainsi sur les grands médias : rapidité des flux (avec Twitter) et étalage de la vie privée (avec Facebook). La précipitation et le racolage sont les deux mamelles du journalisme « en temps réel » (...)

Pour l’analyse, il faudra repasser. Ou pas.