Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Regards
La fake news de Madame Salamé
Article mis en ligne le 11 février 2020

Ce qui est terrible quand on profère un mensonge en direct à la radio, c’est qu’il révèle aussi votre méthode de travail : cliquer sur le premier lien Google et lire la première phrase. Bernard Marx rétablit les faits.

J’étais tout à ma joie de ne pas avoir à écouter un des ministres qui ont leur rond de serviette au Grand Entretien de France Inter, ou à tourner le bouton pour ne pas avoir à écouter leurs sempiternelles rengaines. (...)

C’est alors que j’ai entendu Léa Salamé apostropher l’économiste avec l’assurance de quelqu’un qui sait naturellement de quoi elle parle : « Comment on explique le taux de pauvreté inférieur aux États-Unis qu’il l’est en France. Ça, c’est clair. Et qui continue à baisser ces cinq dernières années, malgré les politiques Trump. » « Heu ! Alors là, je suis loin d’être sûr que le taux de pauvreté soit inférieur aux États-Unis qu’en France », lui a répondu poliment l’ignorant chercheur. Mais la journaliste a tenu à conclure : « Je veux juste préciser, parce que j’ai retrouvé sur ce que j’ai dit sur le taux de pauvreté, le taux de pauvreté c’est 13,1% aux États-Unis et 14,8% en France ».

Effectivement, quand on tape sur Google « taux de pauvreté aux États-Unis », apparaît en première ligne la phrase : « La pauvreté aux États-Unis concerne officiellement 43,1 millions de personnes, soit 13,5% de la population américaine en 2015 ». Et si l’on tape « taux de pauvreté France », la première phrase qui s’affiche est : « Selon l’Institut national des études économiques, 14,7 % de la population vivaient sous le seuil de pauvreté en 2018 ».

Sauf qu’il faut quand même faire l’effort de lire les deuxièmes phrases. Si elle les avait lues, la journaliste politique de référence sur les ondes du service public n’aurait pas pu dire que le taux de pauvreté aux États-Unis est inférieur à celui de la France. Ou alors elle aurait diffusé sciemment une fausse nouvelle. À chacun son opinion sur ce point.

Au-delà du premier résultat Google (...)

En clair, le taux de pauvreté officiel aux États-Unis n’est pas calculé de la même manière qu’en France. (...)

évidemment, si l’on veut comparer les taux de pauvreté aux États-Unis et en France, il faut les calculer de la même manière. Il n’y a pas à chercher très loin. Il suffit de taper « taux de pauvreté par pays ». Le premier lien qui s’affiche est celui de l’OCDE. On tombe sur une page qui donne le taux de pauvreté calculé avec un seuil de 50% du revenu médian. Pour la ligne France cela donne 8,3% (en 2016) et pour la ligne États-Unis 17,8% (en 2017).

Le graphique est éloquent. La France figure encore – avant l’impact de la réforme macronienne du chômage et celle de la retraite – parmi les pays où le taux de pauvreté est le plus bas et les USA est le pays riche où le taux de pauvreté est le plus élevé. Si l’on prend le seuil de 60% du revenu médian, le taux de pauvreté aux USA est de près d’un quart (24,2%), soit 10 points de plus qu’en France selon l’Observatoire des Inégalités.

Madame Salamé va-t-elle corriger et s’excuser ou s’enfoncer dans le journalisme de fake news de classe ? Réponse demain.