
Les immenses mall - centres commerciaux - qui parsèment les Etats-Unis connaissent de plus en plus de difficultés économiques. L’ère de la consommation de masse qu’ils symbolisaient s’achève. De nouvelles formes urbaines apparaissent. Mais il serait bon d’anticiper, et de ne pas continuer à construire ces centres commerciaux en Europe et ailleurs.
Le 29 décembre dernier, le géant du commerce américain Sears annonçait la prochaine fermeture d’une centaine de ses 2248 supermarchés (department store) aux Etats-Unis. La suite logique d’une chute inexorable de son volume de vente et de son chiffre d’affaires depuis une dizaine d’années.
Le phénomène ne se limite pas au groupe Sears puisque la plupart des groupes américains du secteur voient leurs surfaces commerciales se réduire entraînant les propriétaires des murs dans la crise (General Growth Property, le plus important propriétaire de centres-commerciaux américains, a fait faillite dès 2009). Cette situation questionne aujourd’hui l’avenir de ces temples de la consommation et en prolongement, celui de ces vastes banlieues qui se sont agglutinées, voire structurées alentour.
A l’heure actuelle, si la crise économique n’est pas étrangère à la baisse de la consommation américaine, il est impossible de ne pas voir poindre la fin d’un modèle de commerce qui a participé au développement fulgurant de la "suburbia" (les banlieues blanches américaines) et grandement contribué au consumérisme massif façon "american way of life" ainsi qu’à sa diffusion dans le monde entier. (...)
se pose la question du devenir de ces premiers "fantômes" urbains qui risquent d’être au XXIème siècle ce qu’étaient les usines au XXème siècle : les vestiges non plus d’une production délocalisée mais de modes de consommation révolus. Ils sont devenus des terrains d’exploration pour photographes et jeunes intrépides et il est probable que beaucoup, grâce à la qualité de leurs espaces, accueillent déjà fêtes et free-parties, participant ainsi à la naissance d’un nouvel imaginaire urbain de l’interdit et de la transgression.
Reste qu’en attendant que ces malls deviennent des vastes lieux de vie nocturne, beaucoup sont aujourd’hui reconvertis grâce à des initiatives communautaires ou de nouvelles stratégies commerciales.
Ainsi, une partie du Highland Mall d’Austin a été racheté par l’Austin Community College et à Knoxville (Tennessee) une église baptiste s’est installée dans le Tri-County Mall. D’autres centres commerciaux en difficulté financière se reconvertissent comme NorthGate Mall de Seattle qui s’est spécialisé dans le service aux personnes âgées (majoritaires dans son secteur comme dans de nombreuses banlieues américains vieillissantes) ou comme le Galleria Mall de Cleveland qui encourage le développement de cultures "hydroponiques" de légumes dans sa galerie marchande ! (...)
Qu’il soient "morts" ou "vivants", ces malls ont aujourd’hui la possibilité de devenir de vrais lieux de vie et de polarité au coeur de la suburbia.
Surtout, le lent déclin américain de ce modèle aujourd’hui mondialisé ne doit pas manquer d’alerter ceux qui continuent aujourd’hui de construire à tout-va des zones commerciales sans valeur ajoutée aux portes des villes européennes ou asiatiques. (...)