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La politique dans « C dans l’air », c’est le vide
Article mis en ligne le 15 septembre 2014
dernière modification le 3 septembre 2014

L’émission « C’dans l’air » du lundi 25 août était logiquement consacrée à la démission du gouvernement, intervenue le matin même. Le titre, « Et maintenant : la crise politique », et la liste des invités (le directeur adjoint de la rédaction du Figaro Yves Thréard, le directeur de la rédaction de L’Express Christophe Barbier, la journaliste du Monde Raphaëlle Bacqué et le directeur général délégué de l’institut Ipsos Brice Teinturier) ne laissaient guère de suspense quant à la teneur des discussions : il s’agirait avant tout de décortiquer les rapports de force au sein de la majorité, et surtout de disséquer les tactiques et les ambitions personnelles des ministres et des « ministrables »…

Des enjeux cruciaux, de politique économique notamment, qui sous tendaient les désaccords de fond qui existaient au sein du gouvernement et qui aboutirent à cette démission/limogeage de trois ministres importants, il ne fut finalement pas question. L’on a beau être habitué à cette personnalisation et cette théâtralisation de la vie politique, surtout de la part de « C dans l’air », elle demeure inacceptable…

Évidemment, cette émission n’a pas été la seule à offrir cette triste image de l’information politique, comme nous le rappellerons à la fin, mais elle en a été un bel exemple. (...)

ce sont les deux reportages proposés en cours d’émission qui atteignent le comble de la personnalisation et de la théâtralisation. Le premier, dramatisé à l’envi, avec commentaire et musique à l’appui, revient sur les dernières 24 heures… d’Arnaud Montebourg ! Quant au portrait dressé du dirigeant socialiste dans le second sujet, il ne dit évidemment pas un mot de la ligne politique qu’il défend et s’en tient à revenir encore et encore sur son comportement et sur son style, ainsi que sur ses multiples déclarations ayant été source de polémiques. Mais si l’on ne sait rien des propositions de Montebourg à l’issue de ce reportage, l’on a en revanche appris qu’il serait « un agent provocateur du PS », « un fauve de la politique » qui « aiguise ses ambitions », et qu’il est considéré comme « dangereux à l’intérieur et incontrôlable à l’extérieur ». Rien que ça. (...)

Il serait malhonnête de dire que l’émission n’a porté que sur le comportement de Montebourg. Celle-ci a aussi permis aux invités de proposer de fines analyses des stratégies politiciennes des uns et des autres. Montebourg est alors présenté comme un jeune politicien ambitieux et cette crise comme la conséquence d’une manœuvre politicienne. Et cette agitation politique, réelle friandise médiatique, donne alors lieu à toutes les hypothèses sur les manières pour les uns et les autres de se sauver « politiquement ». Il est alors question d’alliances, de recherche de majorité, d’électorat et de popularité. Mais en définitive, elles ne nous permettent pas plus de « comprendre et d’appréhender » cette question « dans sa globalité », pour reprendre les mots de la présentation de l’émission sur son site. (...)

Dans ce traitement médiatique qui pour l’essentiel a privilégié la forme sur le fond, les hommes et femmes politiques ont sûrement leur part de responsabilité. Publicitaires de leur propre personne, ils sont souvent les premiers à jouer de leur image à travers les médias. Il n’en demeure pas moins qu’en passant sous silence, avec un zèle toujours renouvelé, tout débat de fond qui va au-delà des évidences partagées par une poignée d’éditorialistes dominants, et en donnant une image de la vie politique dépolitisée, cynique et rebutante, les médias dominants et les émissions soi-disant « politiques » ont une responsabilité écrasante dans l’atrophie du débat public.